Le Fonds Interprofessionnel d’Assurance Formation (FIAF NC), c’est un formidable outil calédonien conçu pour la Calédonie ! Il a été créé dès 2015 par les partenaires sociaux pour conseiller, accompagner et financer la formation professionnelle continue des salariés du privé. Forcément, alors que la Nouvelle-Calédonie est en plein coeur de sa transition numérique, l’occasion était belle de nous intéresser à la façon dont cet organisme – et plus largement le secteur de la formation professionnelle – s’adapte à la révolution digitale. Nous avons donc eu le plaisir de rencontrer Séverine Zimmer, la directrice du FIAF, pour discuter de ses dernières actualités et des nouveaux modes de formation innovants !
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Bonjour et bienvenue sur NeoTech ! Pourriez-vous commencer par vous présenter à nos lecteurs ?
Bonjour à tous les lecteurs de NeoTech ! Je suis Séverine Zimmer, la directrice du FIAF NC. Je suis le développement de cet organisme depuis sa mise en place en 2016. Ma carrière a toujours été en lien avec la formation professionnelle continue. J’ai longtemps travaillé dans ce sens avec la Province Nord, notamment au moment de la construction de l’usine KNS. J’ai également travaillé comme responsable de projet de formation à la DFPC et comme prestataire indépendante pendant quelques temps, toujours en ingénierie… de la formation ! Me voilà désormais au FIAF, depuis maintenant déjà six ans !
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Pouvez-vous nous présenter le FIAF, son historique et sa raison d’être sur le territoire ?
Les partenaires sociaux sont ceux qui ont porté le projet dans un premier temps en créant l’association dès 2015. Ces derniers – c’est-à-dire les organisations syndicales et patronales – voulaient donner l’opportunité à toutes les entreprises du pays, grandes et petites, de pouvoir former leurs salariés et de miser sur la montée en compétences. Jusque-là, les entreprises de moins de dix salariés n’avaient quasiment aucun moyen en la matière : il faut dire qu’il n’y avait alors aucune incitation réglementaire les concernant à former leurs employés ! Quant aux entreprises de plus de dix salariés, il existait pour elles une dépense obligatoire annuelle, correspondant à 0,7% de leur masse salariale, à reverser aux impôts. Cette dépense existe toujours, mais depuis 2017, ces entreprises peuvent désormais choisir de verser cette somme au FIAF !
C’est d’ailleurs ce qu’a principalement changé l’arrivée du FIAF. Désormais, nous ne sommes plus sur une logique de dépense obligatoire annuelle mais au contraire de contribution : qu’est-ce que je viens chercher comme service ? De quoi ai-je besoin pour mon entreprise ?
J’ai donc pris mes fonctions au FIAF en 2016 pour commencer à mettre en place cette nouvelle donne et nous avons collecté les premières contributions patronales dès 2017.
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Quelle est l’offre de services du FIAF et à qui s’adresse-t-elle ?
Notre offre de services s’adresse à toutes les entreprises employeuses du territoire ! Il s’agit d’un point crucial pour le FIAF : que vous ayez un salarié quelques heures par mois ou mille salariés à temps-plein, vous serez logés à la même enseigne ! Nous sommes un fonds mutualisé dont l’idée est justement de pouvoir équilibrer les politiques de formation au sein des entreprises.
Dans le détail, nous avons donc trois volets à notre offre de services.
Un premier volet consiste à financer les plans de formation. Si, en tant qu’entreprise, je fais une dépense liée à de la formation pour mon activité, je peux venir chercher un remboursement au FIAF. Cela permet donc d’envisager plus sereinement son budget de formation ! Nous sommes actuellement à 600 000 francs annuels reversés aux entreprises.
Nous disposons également d’un volet accompagnement, puisque la plupart des entreprises est souvent démunie face aux besoins liés à la formation. Nous nous appuyons alors sur un pool de consultantes qui rayonne dans les entreprises. Leurs missions sont un peu différentes en fonction du nombre de salariés. Pour les plus petites structures, ces consultantes proposent directement des plans de formation, en définissant en bonne intelligence avec l’entreprise la meilleure stratégie à adopter. Pour les structures accueillant plus d’une quinzaine de salariés, nos consultantes effectuent ce que l’on appelle une « visite conseil » : cela permet de faire un petit audit de leur process de formation et de proposer des outils complémentaires pour les aider.
Enfin, le troisième volet de notre offre consiste en de la programmation ! Nous disposons de cheffes de projets qui sillonnent les organisations patronales et vont proposer un accès gratuit à de la formation en la matière.
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Quelles sont vos actualités les plus récentes et sur quels projets d’avenir travaillez-vous actuellement ?
Nous travaillons actuellement sur deux projets : un serious game et un MOOC.
Le serious game a été conçu pour tous les organismes de formation du pays ! Nous ne voulions pas nous lancer dans un label qualité, mais simplement aborder ce sujet de façon ludique. Nous nous sommes donc rapprochés des sociétés SF2I et Fun Storming pour mettre en place ce jeu. Il devra permettre aux 180 organismes de formation du territoire de mieux faire le lien avec le FIAF et de mieux appréhender ce point essentiel de la qualité.
Le souci d’une plus grande fluidité entre le FIAF et les organismes de formation est vraiment crucial à nos yeux. En effet, nous sommes un organisme intermédiaire et financeur qui se situe en quelque sorte entre le besoin exprimé par les entreprises et les fournisseurs à même d’y répondre.
Le projet de MOOC est, quant à lui, porté par Mehdi Mahroug et s’adresse plutôt aux acheteurs de formation au sein des entreprises. Il faut bien sûr toutefois souligner que 90% des entreprises du territoire ne disposent pas d’une personne spécialement dédiée à l’achat de ces formations ! Ce sont donc parfois des comptables ou les responsables RSE qui se retrouvent à devoir mener à bien cette mission. Ce MOOC devra permettre à ces personnes – dont ce n’est pas le métier – de mieux appréhender le process formation.
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Comme de nombreux secteurs, la formation n’échappe pas à la vague de la digitalisation. En quoi le numérique a-t-il révolutionné la formation professionnelle et comment le FIAF compte-t-il s’adapter à ce nouveau paradigme ?
Je vois là plusieurs sujets. D’un côté, nous devons accompagner du mieux possible les entreprises face à leurs enjeux de digitalisation. Ensuite, d’un autre côté, nous devons nous-mêmes transformer notre façon d’appréhender la formation, à la lumière de ce nouveau paradigme.
Pour ce qui est de la digitalisation des entreprises, c’est un sujet très souvent évoqué en interne mais qui peut s’avérer très compliqué pour elles à mettre en place. En effet il ne s’agit pas simplement de former son personnel à utiliser les nouveaux outils digitaux : il faut également trouver les financements qui permettent de les acquérir ! Ce sont des questions qui sont propres aux enjeux de développement d’une entreprise. Nous sommes toutefois bien attentifs à proposer une offre de formation qui aille dans le sens des compétences numériques essentielles.
Parallèlement à cela, la crise sanitaire nous a permis de nous rendre compte que, sans la possibilité d’assurer des formations en présentiel, nous étions vite à court de solutions… Le premier confinement a coïncidé avec un gel des formations sur le territoire. Nous avons donc pris l’initiative de lancer des modules afin d’assurer davantage de formations à distance. Nous nous sommes alors appuyés sur le CNAM et avons mis gratuitement en ligne une plateforme Moodle pour que les organismes de formation puissent également se lancer dans cette démarche, sans avoir à investir dans les outils numériques.
Nous avons organisé huit ou neuf sessions allant dans ce sens au cours des deux dernières années. Au-delà du covid se pose véritablement la question de la capacité des salariés d’une entreprise à suivre une formation en présentiel plusieurs jours d’affilée. Bien sûr, certaines formations requièrent toujours cette présence de l’apprenant : si vous voulez vous former au soudage à l’arc, il va bien falloir manier l’outil… C’est un peu différent pour le secteur des services, par exemple.
Il faut alors se demander comment engager la multi-modalité de l’apprentissage. Nous travaillons aujourd’hui – et cela se reflète dans nos critères d’achat – avec les organismes de formation pour bien veiller à cette alternance entre le présentiel, le distanciel, le e-learning et l’accompagnement…
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Quels sont les nouveaux modes de formation innovants et sur quels outils s’appuient-ils ?
Je dirais que se focaliser sur l’outil digital, à première vue le plus innovant, serait une erreur ! Nous avons compris l’importance d’une multi-modalité dans la formation. Proposer 100% de e-learning, c’est l’assurance de perdre autant de stagiaires que sur du 100% présentiel.
Je pense donc que la clé repose dans cette alternance et cette inventivité dans les formations proposées.
Nous avons d’ailleurs mis en place un appel à projet « innovation pédagogique », ouvert dans le temps et à tous les organismes de formation ! L’idée est d’offrir à ces organismes un espace de recherche et de développement afin de réfléchir aux modes de formation de demain. Je regrette que nous ayons pour l’instant que peu de propositions et nous invitons encore une fois tous les organismes de formation du Caillou à s’approprier cette opportunité.
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Le blended learning est un format de formation qui séduit de plus en plus : proposez-vous ce type de formation et à qui s’adresse-t-il ?
Le blended learning, c’est finalement ce dont je vous parlais auparavant : il s’agit de mélanger différents modes de formation ! E-learning, présentiel, jeux pédagogiques, etc. Je pense personnellement que ce format représente l’avenir de la formation.
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D’après le dernier baromètre de l’Observatoire du Numérique, la maturité économico-numérique du territoire laisse encore à désirer. Quel est votre regard sur les usages numériques des Calédoniens ?
Je dirais que les Calédoniens sont majoritairement connectés. Il y a une culture numérique qui s’est mise en place, les smartphones se sont de plus en plus démocratisés et la couverture réseau du territoire est excellente à mes yeux. Je pense plutôt que la fracture numérique est générationnelle.
Toutefois, les jeunes générations accusent de grosses lacunes en matière de digitalisation professionnelle. On pourrait croire que les jeunes issus de la « Génération Z » sont tous hyper affutés niveau informatique, mais ils se limitent beaucoup aux réseaux sociaux… Il arrive trop souvent qu’un jeune professionnel ne soit pas capable de rédiger correctement un email ! La question est donc de savoir comment apporter cet usage professionnel du numérique aux plus jeunes. La bonne nouvelle, c’est qu’ils apprennent vite !
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Un dernier mot pour nos lecteurs ?
Merci aux lecteurs de NeoTech d’avoir suivi cette interview et je vous invite à consulter le site internet et les réseaux sociaux du FIAF pour redécouvrir le détail de nos services et de nos actualités ! A bientôt !
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