Le numérique : qui d’entre-nous peut-il vraiment y échapper ? Notre vie quotidienne en est baignée : desktop, laptop, tablette, smartphone et autres écrans de tous genres, courriel (déjà « has been »), post, IA, Big Data, FB, cryptomonnaie, darknet, un tweet, un snap et un café s’il vous plait ! L’univers dans lequel nous vivons est celui-là. Pour les réfractaires, vous pouvez essayer de résister… essayer seulement. Alors plutôt que de tenter d’arrêter l’eau qui monte : apprenons à nager !

Le numérique s’impose à nous. Il va falloir apprendre à nager !

Dans ce monde devenu numérique, les écosystèmes et les sociétés voient apparaître de nouveaux acteurs (start-ups, sociétés « digital native », etc.). Pour ceux-là, la mer est bleue. Certains acteurs se transforment de manière volontaire. Ces acteurs qui se sont rendus compte assez tôt du changement d’environnement se dirigent sur des courants porteurs, ils considèrent le digital comme une opportunité. Puis, il y a des survivants. L’adaptation se fait dans la douleur, la tempête est là. Les dirigeants passés n’ont pas perçu les enjeux liés au numérique. Ils ont été remplacés par de nouveaux. Puis il y a des morts. Tout le monde n’a pas su s’adapter à un changement d’environnement. Certaines épaves sont déjà au fond de l’eau et font l’objet d’études dans les Business School (avec un sourire bien entendu du prof de marketing qui, lui, avait compris dès 1992 que le web allait révolutionner l’industrie de la distribution).

Une organisation, une économie ou encore un pays ne peuvent s’abstraire, ni même se tenir provisoirement à l’écart des progrès technologiques au risque d’un décrochage. La transformation des organisations dans un monde numérique n’est pas une option, il s’agit de s’adapter à son environnement.

Alors quels sont ces changements qui font qu’il n’est pas si simple d’apprendre à vivre dans un ce monde numérique quand on est une organisation ou une entreprise ?

Réinventer la gouvernance des systèmes d’Information et repenser le rôle des DSI

Ces dernières années, les outils numériques se sont développés plus vite dans la sphère privée que dans la sphère professionnelle : disposer d’un courriel : un clic, un espace de stockage pour déposer et partager des fichiers : un clic, créer un site web ou une page FB : deux clics, consulter son compte bancaire : un clic, répondre à une question d’un internaute, accéder à mes informations personnelles partout, en mobilité et n’importe quand, etc.

Alors si c’est si facile chez moi de communiquer et de disposer de nouveaux services numériques, pourquoi est-ce plus compliqué au sein de ma société dans laquelle je dispose pourtant d’une équipe informatique dédiée ? 

Ainsi, les usages de la vie privée pénètrent le monde professionnel. Les utilisateurs veulent être autonomes pour obtenir des services numériques rapidement, pouvoir en changer, changer d’avis, pivoter et recommencer : « Plus le temps de perdre de temps avec la DSI » ! La demande de réactivité est de plus en plus grande. L’impatience est la règle.

Le besoin de mise à disposition rapide et facile de nouveaux services et usages numériques au sein des entreprises oblige à réinventer la gouvernance des systèmes d’Information et à repenser le rôle des DSI.

Innover n’est plus une option !

Qui croit encore que l’intelligence artificielle, le big data, par exemple, sont des domaines réservés à la recherche ? Alors certes, on en parle beaucoup dans les journaux nationaux, internationaux et parfois même dans Neotech… Certaines personnes au sein des sociétés en parlent aussi. Mais une expérience sur le caillou montre que peu d’organisations – pour ne pas dire personne ! – ne songe réellement à considérer ces technologies comme “implantables”. Auto-dévalorisation mal venue ou syndrome du « petit pays » ?

Dans le domaine du numérique, la première erreur consiste à considérer que le sujet de l’innovation est celui des informaticiens et pas celui de la Direction Générale. En réalité, les innovations d’usages viendront d’abord des métiers et non des ingénieurs : est-ce que les inventeurs d’Internet ont été les plus innovants en termes d’usage avec le web ?

Les innovations qui correspondent à de nouvelles méthodes de production permettent de produire plus avec moins de travailleurs. Pourtant, l’innovation interne reste souvent le fruit de « la main de Dieu », de la bonne idée. Des démarches d’innovation internes organisées et portées au niveau le plus haut de l’entreprise peuvent être engagées pour passer du stade de la bonne idée à l’entreprise innovante. Le numérique ouvre le champ des possibles de l’innovation : ne pas comprendre ce nouveau champ des possibles revient à courir avec de la colle sous les chaussures.

Ici, le chewing gum serait le symbole d’un manque d’innovation : capito ?

La relation avec les clients est modifiée 

Que ce soit avec les clients ou en interne aux entreprises, la relation à l’autre est modifiée avec le changement de mode communication et le changement d’outil. Les clients entrent en contact avec les entreprises de manière « multicanale » (courriel, chat, post sur un réseau social, guichet physique, etc.) ce qui impose le développement de services hybrides qui combinent dispositifs numériques et physiques. La notion de maîtrise du parcours client prend tout son sens.

De plus, si le changement d’outil ne suffisait pas, il induit un changement au niveau de la relation au temps : un guichet numérique est-il accessible seulement de 7h30 à 15h et 5 jours sur 7 ? Est-il attendu par le client de recevoir une réponse par courrier avec un délai d’a minima quelques jours alors que j’ai posé ma question par courriel ? Est-il attendu de recevoir une réponse par courriel alors que j’ai « posté » une question dans un forum numérique ?  Une symétrie des formes est souvent attendue par le client et au-delà de la forme une « synchronisation temporelle » entre le client et l’organisation est espérée. Une organisation qui accepte le changement acceptera que ce soit le client qui donne le tempo.

La relation entre les collaborateurs est modifiée 

Les nouveaux outils de communication induisent plus de transversalité : intelligence collective et travail en groupes, techniques et outils collaboratifs sont la traduction opérationnelle de la présomption de compétence du collectif. Information immédiate, partagée et indépendante des hiérarchies, adaptabilité forte aux situations de changement par les acteurs au plus proche du terrain (agilité organisationnelle au plus proche de la situation d’exception) : cette horizontalité « de fait » des organisations impose de nouveaux comportements, l’adaptation des règles de gestion des RH, les managers deviennent dédiés au bon fonctionnement du groupe.

« Aujourd’hui, pour peu qu’il ait consulté un bon site, l’étudiant, le patient, le consommateur, ou même l’enfant peut en savoir autant sur le sujet traité que le maître, le médecin, le directeur, le journaliste ou l’élu. Nous disons que l’autorité est en crise parce que nous passons d’une société hiérarchique, verticale, à une société plus transversale, notamment grâce aux réseaux comme Internet. Tout ne coule plus du haut vers le bas, de celui qui sait vers l’ignorant. Les relations parent-enfant, maître-élève, État-citoyen… sont à reconstruire. Michel Serres ». 

Système pyramidal => système horizontal

Le management top-down n’est plus l’alpha et l’oméga. Le chef ne cheffe plus … il « coache ». Il s’agit de développer l’autonomie et favoriser les initiatives. L’organigramme s’aplatit. Le middle manager voit son rôle se reconfigurer pour être au service de la performance du groupe. En bref : changer de culture.

L’économie de la connaissance s’impose. Les métiers se transforment.

Le spectre des tâches et des fonctions pouvant être automatisées a considérablement élargi. Si l’industrie a été la première concernée, le secteur des services l’est aussi.

Par exemple, l’automatisation de certaines activités ou la dématérialisation de la relation client ont un impact sur les métiers (secrétariat, gestionnaire, accueil, etc.) ; chacun d’entre-nous effectue des tâches de secrétariat, les télé-services transforment la notion de relation client, les gestionnaires sont remplacés par des robots, etc.

Posons-nous ces questions : « Quels sont les métiers au sein de ma société, de ma direction ou de mon service qui vont être impactés ? De nouveaux métiers vont-ils apparaître / être nécessaires à mon activité ? A quel horizon de temps ? ».

Exemple de déclinaison (ou l’automatiseur automatisé) :   Au sein de ma DSI, aurais-je encore besoin de la même structure RH avec le développement du Cloud  Computing ? Le développement des solutions « NO CODE » rendent les utilisateurs plus autonomes. Aurais-je encore besoin de développeurs ?  

La révolution numérique a un impact sur l’organisation du travail dans l’espace et dans le temps

Au fur et à mesure que l’automatisation déplace les frontières du possible, les compétences non automatisables prennent de la valeur. Alors qu’est ce qui est difficilement automatisable et, donc, a de la valeur ?

  • Gérer les exceptions, répondre à ce qui n’était pas prévu et résoudre les problèmes
  • Développer les compétences et donner de l’autonomie au terrain. Augmenter le niveau de qualification. Placer la transition numérique au cœur du dialogue social.
  • Innover et créer de la connaissance
  • Sortir de la gestion 100% procédurale, permettre de sortir du cadre, admettre le droit à l’erreur, savoir valoriser les échecs. Favoriser l’émergence des idées.
  • Agir vite face au changement d’environnement continu
  • Pivoter, changer, s’adapter et … vite. Travailler en transversal. Être agile.

Au niveau individuel, les compétences sociales (travail en équipe, intelligence sociale) et les compétences situationnelles (apprendre à apprendre, autonomie, résolution de problèmes), les fameux “soft skills” demeurent parfaitement humains et nécessaires. Une part significative de la population active devra rapidement acquérir ou faire progresser ses compétences numériques générales, cognitives, sociales et situationnelles. 

Être acteur de sa transformation dans un monde numérique

S’il en était besoin, cet article avait pour objectif de brosser un cadre général (et peut-être pas exhaustif) de ce que nous appelons « la transformation dans un monde numérique ». Le mot important ici n’est pas numérique. Le « dans un monde numérique » souligne que ce monde s’impose à nous.

Le mot important ici est celui d’une transformation qui est maintenant presque Darwinienne : transformation de la relation client, de la relation interne, de l’organisation du travail dans l’espace et dans le temps, du management, du rôle des systèmes d’information, de la culture d’entreprise, etc. En acceptant cette définition, chacun aura compris que la transformation dans un monde numérique n’est pas un sujet technique et qu’il convient de s’en emparer au plus haut niveau de l’entreprise.