Ripple, Ethereum, Bitcoin, Dash, Litecoin… La liste des crypto-monnaies existantes est presque aussi longue que celle des monnaies fiduciaires qui glissent de main en mains à travers le monde. Reposant sur la technologie de la blockchain, ces monnaies numériques indépendantes des systèmes bancaires traditionnels ont vu leur popularité grimper aussi vite que leurs cours. Rien d’étonnant donc à ce qu’elles subissent, comme les monnaies traditionnelles, des crises. Celle de mai 2021 restera dans les annales. Éclairage sur cet or numérique qui déchaine les passions des crypto-investisseurs. 

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Crypto-kesako ? 

Satoshi Nakamoto. Ce nom ne vous dit sans doute rien, et pour cause : il n’est en réalité qu’un pseudonyme, celui du créateur du logiciel Bitcoinla première crypto-monnaie mise en ligne en 2009 en réaction à la crise économique qui touchait le monde. « Je suis passé à autre chose et je ne serai probablement plus là à l’avenir » : voici les derniers mots du mystérieux Nakamoto qui datent de 2011 et qui disparaît ensuite en emportant avec lui pas moins d’un million de bitcoin – l’équivalent de 48 milliards de dollars ! Désormais devenues de véritables stars des milieux financiers numériques, les crypto-monnaies ont continué à se développer comme des alternatives à un système financier instable et basé sur la confiance envers les banques. 

Mystères autour du créateur du bitcoin ©Bitcoinplay.net

« Une crypto-monnaie est une devise numérique décentralisée, qui utilise des algorithmes cryptographiques et un protocole nommé « blockchain » pour assurer la fiabilité et la traçabilité des transactions », peut-on lire sur le site Futura-Sciences.com. Échangeables de « pair à pair » via des sortes de bourses en ligne telles que Bittrex ou Binance, ces crypto-monnaies peuvent également être converties en « monnaies-fiat », autrement appelé « cash » ou « billets de banque ». A la différence de leur plus vieil ancêtre, « DigiCash », fondé en 1989, elles reposent pour leur part sur la « blockchain », une technologie de stockage et de transmission d’informations de manière transparente et sécurisée fonctionnant sans organe de contrôle. Dans les faits, la « blockchain » ressemble à une base de données qui contient l’historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création. 

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La Blockchain, une base de données décentralisée et sécurisée

Cette « transaction par chaîne de blocs » est décentralisée et repose sur un fonctionnement autocontrôlé. Elle débute avec l’identification de chaque partie – vous et moi – à travers un procédé cryptographique. La transaction est ensuite envoyée à un « nœud de stockage », soit un réseau d’ordinateurs situé n’importe où dans le monde. Chacun de ces nœuds – ordinateurs – héberge une copie de la base de données contenant l’historique des transactions effectuées auquel chaque partie concernée peut accéder simultanément. Les données sont ensuite déchiffrées et authentifiées par des centres de données, aussi appelé « mineurs ». La transaction, une fois validée, est ajoutée sous la forme d’un bloc de données chiffrées et chacun de ces nouveaux blocs ajoutés à la blockchain est lié au précédent.  Ainsi, cette intégration demeure chronologique, indélébile et infalsifiable. 

La blockchain, une transaction décentralisée et sécurisée © La Tribune

Les avantages de cette technologie sont nombreux ; en effet, elle autorise une rapidité quasiment inimitable des transactions : le temps de validation d’un bloc ne prend généralement que quelques secondes. La sécurité est assurée par le système de validation des « nœuds » qui ne sont finalement que des utilisateurs différents qui ne se connaissent pas et qui surveillent simultanément et sans le savoir le système global et se contrôlent ainsi mutuellement. Cette technologie permet donc de générer des gains de productivité et d’efficacité importants car elle confie l’organisation des échanges à un protocole informatique décentralisé qui réduit automatiquement les coûts « traditionnels » de transaction et de centralisation. C’est donc la « blockchain » qui est au cœur de l’utilisation des crypto-monnaies. 

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Bitcoin mais pas que… 

Si la star des crypto-monnaies reste le bitcoin qui représente plus de 50% du marché total, de nombreuses autres crypto-monnaies coexistent. Thibaud Leflaive, fondateur du site « Cryptos.nc » et formateur chevronné en matière de cryptos, complète : « en plus des bitcoins – à la fois monnaie et système de paiement -, il y a les « Altcoins », crypto-monnaies « alternatives », c’est-à-dire toutes crypto-monnaies autres que le bitcoin. Parmi elles, certaines ont l’ambition de concurrencer le bitcoin mais d’autres ont des fonctions différentes, comme payer un service sur un protocole à blockchain par exemple. Et il y a enfin les « Stablecoins » : des crypto-monnaies adossées à une monnaie fiduciaire et dont le prix reste très stable ». 

En 2019, on dénombrait pas moins de 2 400 crypto-monnaies différentes. Un an plus tard, en novembre 2020, le catalogue « CoinMarketCap » en recensait 7 797 ! On pourrait ainsi passer des journées entières à énumérer ces différentes formes de monnaies numériques dont la capitalisation globale avoisinait, au 6 mai, les 2 400 milliards de dollars ! Chacune de ses monnaies n’a évidemment pas la même valeur et leur volatilité demeure globalement assez forte ce qui provoque parfois des crises. Ainsi, le 7 janvier 2018, l’explosion de la « bulle des crypto-monnaies » rappelait à ses utilisateurs et, plus globalement, au monde entier que les mots de Warren Buffet à propos de ce marché – « une folie totale ! » – pouvait paraître sensés. 

Capitalisation boursière des 10 premières cryptas au 6 janvier 2021 ©Andlil.com

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Mai 2021, un nouveau krach ! 

Après une nouvelle année record, les cryptos et le bitcoin viennent de connaître un nouveau krach mondial le mercredi 19 mai 2021 et de perdre entre 20% et 60% de leur valeur. Les causes de ce nouveau krach sont diverses et sujettes à interprétations. Les experts mettent en avant trois facteurs discutables et sûrement complémentaires pour expliquer cette chute. 

Au début de la fameuse semaine, Elon Musk avait encore fait des siennes en annonçant que son entreprise « Tesla » n’acceptait plus le bitcoin en tant que moyen de paiement pour ses voitures. Étrange retournement de veste puisque, trois mois plus tôt, la firme avait indiqué avoir acquis pour 1,5 milliards de dollars de bitcoins ! L’argument du coût « écologique » publiquement évoqué par le super CEO semble néanmoins être contredit par la volonté toute puissante d’investisseurs craintifs face à la soudaine volatilité de la crypto-monnaie. 

Le lendemain, mardi 18 mai, le gouvernement chinois annonçait plusieurs mesures en défaveur des crypto-monnaies et, en particulier du BitCoin afin de limiter l’utilisation des cryptos dans le pays. Cette volonté apparente de limiter « le trading spéculatif » semble pourtant avoir déjà fait long feu puisque la Chine teste actuellement un yuan numérique afin de concurrencer le dollar dans les échanges internationaux. Cherchons ailleurs… 

La dernière cause évoquée, sans doute la plus pertinente, concerne la publication des chiffres de l’inflationen date du 10 mai 2021 qui, à elle seule, a fait chuter les principaux marchés boursiers. A l’ouverture, les analyses donnaient -5% pour le SP 500, -7% pour le Nasdaq et -4% pour le Dow Jones. Hasard ? Coïncidence ? C’est également à partir de cette date que le cours du bitcoin a commencé à chuter à son tour… 

Thibaud Leflaive penche lui pour une explication plus générale : « Le bitcoin évolue sur le long terme selon des cycles de hausse et de baisse. Lorsque cette hausse est trop rapide, des corrections s’opèrent naturellement pour corriger les excès du marché. Ce ne sont pas les « news » qui drivent le prix du bitcoinmais plutôt les professionnels, fonds d’investissement et grandes banques, qui, lorsque le prix est à son maximum, commencent à dégager des profits ce qui entraînent de fortes baisses temporaires. Les news peuvent accentuer les effets d’une hausse ou d’une baisse mais ce ne sont pas elles qui changent la donne. »

Thibaud Leflaive dispenses des formations via son site Cryptos.nc

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Cryptos un jour, cryptos toujours ? 

Quelles que soient les causes réelles de la chute des cours des crypto-monnaies, il n’en reste pas moins vrai qu’elles sont devenues une forme de contre-pouvoir financier. Nées en réaction face à la crise dite des « subprimes », reposant sur une technologie sécurisée qui « échappe » aux banques, les crypto-monnaies représentent aujourd’hui des enjeux économiques et géopolitiques trop importants pour qu’elles disparaissent du jour au lendemain comme leur ancêtre « DigiCash » avant elles – RIP depuis 1996 ! 

« Le marché des crypto-monnaies s’inscrit dans un mouvement de fond, c’est une vague technologique que rien ne peut arrêter ! Comme c’est une révolution à la fois économique, sociale et monétaire, le marché se développe ainsi très vite et parfois de manière un peu chaotique mais je reste très optimiste sur lavalorisation du bitcoin à long terme », conclu Thibaud avant d’ajouter : « c’est un actif qui peut rapporter de très gros rendements mais qui présent également des risques si l’on ne se forme pas ; mon conseil ? N’investir que ce que l’on peut se permettre de perdre ! » Ça ressemble un peu à une leçon de poker alors gardez-vous bien de balancer un « all-in », l’addition pourrait être salée ! 

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