“Startupper et conseille dans l’innovation en aquaculture“, c’est la description qu’on peut trouver un tapant “Régis Bador” sur le réseau social professionnel LinkedIn ; en effet, cet entrepreneur aux multiples facettes bénéficie de sa longue expérience comme pénéiculteur pour irriguer la Calédonie de nouvelles solutions agricoles. Lauréat du “Prix Accélération” de l’appel à projet “Tech4Good” lancé par le gouvernement, Régis s’est confié sur le développement de sa nouvelle startup, “Neofly“. Et pour une fois, les asticots ne serviront pas à la pêche !
__
Bonjour Régis et bienvenu sur NeoTech ; après avoir suivi l’appel à projet “Tech4Good” du gouvernement et t’avoir retrouvé dans un épisode de notre émission “CALEDINNO”, te voilà désormais sur NeoTech ! Peux-tu nous présenter ton projet, lauréat du prix “Accélération” ?
Notre projet, lancé avec Nicolas Guillemot et Matthieu Marcellier, consiste à valoriser des biodéchets agricoles et agro-industriels en les utilisant comme nourriture pour larves d’insectes qui sont ensuite transformées en farines et huiles que nous allons fournir aux fabricants calédoniens d’aliments pour animaux d’élevage. Cela remplacera des ingrédients importés de l’extérieur à forte empreinte carbone et peu éco-responsables. Les principales filières visées sont les élevages de crevettes et volailles mais aussi les aliments pour animaux domestiques.
__
Comment avez-vous mis en place ce projet et quelle est sa raison d’être ?
C’est une très jeune entreprise qui doit savoir se développer par étapes. Dans l’agro-alimentaire, toute innovation exige des étapes préalables de recherche et développement pour garantir la sécurité sanitaire des techniques mises au point. Nous venons de terminer notre première année de mise au point avec le soutien d’un programme de R&D que nous co-finançons. Les résultats sont suffisamment encourageants pour accélérer vers l’étape préindustrielle que nous entamons avec enthousiasme.
La raison d’être de Neofly repose sur trois ingénieurs “agro” ayant la même volonté d’œuvrer concrètement dans un projet qui peut contribuer significativement à réduire l’empreinte carbone des animaux que nous produisons, consommons et même exportons de Nouvelle Calédonie. Le projet est né avant la pandémie et la guerre en Ukraine : l’amélioration de l’autosuffisance alimentaire est plus que jamais nécessaire pour un pays insulaire comme le nôtre !
__
Quel est le principal caractère innovant de votre solution et à quel secteur s’applique-t-elle ?
Il s’agit d’affiner les protocoles d’élevages d’insectes dans les conditions très spécifiques de la Nouvelle Calédonie : climat sub-tropical variable et soumis aux cyclones, déchets variés et en partie saisonniers, distanciation des gisements de déchets, etc… et d’aboutir à un modèle de production particulièrement éco-responsable et adapté aux environnements insulaires tropicaux qui ont tant besoin d’économies circulaires.
__
Vous avez récemment remporté le prix “Accélération” Tech4Good, un appel à projet lancé par le gouvernement ; quel était ce prix et comment s’est déroulée votre candidature ?
En effet, nous avons gagné la mise à disposition d’un bureau dans un environnement « startup » et une aide financière de 8 millions CPF. La concurrence a été rude car il y avait de nombreux projets de qualité. Nous avons consacré le temps qu’il fallait pour nous préparer à présenter notre projet devant un jury prestigieux et avons réussi à faire la différence. Mais le suspens est resté entier jusqu’à l’annonce du prix…
__
Concrètement, à quoi va vous servir le financement garanti aux lauréats ?
Cette enveloppe va participer au financement des multiples activités nécessaires pour consolider le modèle pré-industriel de notre projet sur lequel se basera ensuite le passage à l’échelle industrielle. Un coup de pouce appréciable et également très apprécié ! Merci au gouvernement et aux partenaires de cet appel à projet…
__
Qu’as-tu pensé de cette initiative ?
C’était une excellente initiative, à l’esprit très moderne, nous obligeant à affiner notre dossier et savoir préparer les réponses couvrant toutes les thématiques possibles (technique, financière, environnementale, sociétale,…).
__
Quel regard portes-tu sur l’innovation en Calédonie ? Et sur l’entrepreneuriat ?
Elle bouillonne ! Les envies sont multiples. Mais le passage de l’idée à la réalisation concrète et couronnée de succès est encore une véritable épopée. Certaines structures d’aide comme l’Incubateur et des regroupements comme la FrenchTech NC ou des clusters sont des soutiens importants.
Il existe un vrai esprit entreprenariat en NC qui souffre néanmoins parfois de notre isolement géographique et notre étroitesse du marché.
__
On constate qu’environ 80% des startups s’éteignent après deux ans d’activité… Pour votre part, où vous voyez-vous d’ici deux ans ?
Dans deux ans, nous espérons être au cœur du chantier de notre usine, notre étape industrielle.
__
En quoi la technologie et l’innovation sont, ou seront-elles, des solutions pour préserver l’environnement et lutter contre le changement climatique ?
La connaissance des choses est souvent aidée par la technologie, notamment par la collecte tous azimuts et l’analyse intelligente d’immenses volumes de données. Cela a permis de mettre en avant les impacts d’activités humaines sur l’environnement et le climat. Décrire un problème grâce à la technologie, le « décortiquer », le démontrer et le surveiller sont déjà des étapes pour faciliter l’émergence de solutions, au moins partielles.
__
Si vous deviez citer une startup inspirante, laquelle choisiriez-vous ?
Sans hésiter, “Royal Recy Boat” ! Cette startup est née d’une idée simple, sans doute que beaucoup avait déjà eu en tête, mais cette fois-ci les fondateurs ont eu courage, audace et ténacité pour se lancer jusqu’à la concrétisation de l’idée.
En plus, commencer leur activité « à grande échelle » avec la déconstruction des Blue Boats qui étaient venus piller les eaux calédoniennes de ses bèches de mer, quel symbole ! La valorisation intelligente de tous ces déchets est allée jusqu’à la création d’œuvres d’art (et des éléments de décoration de la Station N). Un beau modèle inspirant pour les candidats startuppers du Caillou !
__
Un dernier mot pour la fin ?
L’avantage de l’innovation est que c’est un processus qui ne termine jamais. Impossible de s’ennuyer dans l’innovation !
__
