La transformation numérique est au coeur des problématiques contemporaines de nos organisations ; institutions, grands groupes, TPE / PME et même associations, tout le monde est concerné par cette (r)évolution. Depuis plus de quinze ans, le cabinet Ifingo accompagne donc les organisations de la place dans ce « monde numérique calédonien » grâce à ses consultants aux expertises digitales diverses et variées, à la conception de schémas directeurs et autres stratégies numériques…
Une société connue et reconnue de tous les acteurs calédoniens qui a pris un petit coup de jeune avec l’arrivée de deux jeunes associés, Mathieu Rolland et Florian Roussel. Nous sommes allés les rencontrer à Belle Vie pour qu’ils partagent avec nous leur vision du futur et de la révolution numérique calédonienne.
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Bonjour Messieurs ! Deux jeunes associés débarquent chez Ifingo à l’aube de sa dix-septième année d’existence, en voilà du changement… Mais qui êtes-vous donc et quel parcours avez-vous suivi ?
Florian Roussel : Salut NeoTech, moi, c’est Florian, parisien d’origine, ingénieur en système d’information et diplômé en 2010 ; j’ai débuté ma carrière à Paris, chez Cap Gemini, avant de rejoindre d’autres sociétés métropolitaines de service. Ma spécialité, c’est la construction d’offres techniques et le conseil en gestion de projets informatiques, principalement sur des offres d’infrastructures informatiques.
Arrivé en Calédonie il y a déjà trois ans, c’est à cette époque que j’ai rejoint « Ifingo », d’abord en tant que consultant, principalement détaché à l’OPT-NC et à la Province Sud. Après ces deux premières années, j’ai échangé avec Xavier Sevin, notre directeur général, afin de lui proposer de plus m’impliquer dans notre société et suis finalement devenu l’un des associés de l’entreprise.
Mathieu Rolland : Bonjour ! Pour ma part, je suis Calédonien d’origine et ingénieur généraliste, diplômé de l’ENSAM. A la différence de Florian, j’ai plutôt exercé chez le client, à la maitrise d’ouvrage, pendant près de sept années, avant de rejoindre « Ifingo ».
J’ai travaillé en métropole, mais également en Calédonie, dans des administrations publiques, dans des établissements bancaires de la place et autres entreprises privées. Début 2020, j’ai rejoint « Ifingo » avec la volonté de me professionnaliser dans le domaine de la gestion de projet. Tout comme Florian, en 2021, j’ai voulu m’investir dans le développement de notre société en Calédonie et j’ai alors rejoint les quatre autres associés.
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Ifingo « accompagne les organisations pour leur transformation dans un monde numérique ». Qu’est-ce que ça signifie concrètement pour les organisations et pourquoi avoir choisi ce terme latin comme dénomination ?
F.R. : Tout comme Xavier, nous n’aimons pas non plus le terme « valise » de « transformation numérique » ! Notre métier, c’est d’intervenir sur tous types de projets informatiques, d’un point de vue stratégique mais également opérationnel. On va ainsi être capables d’accompagner un DSI, un responsable de service et/ou de bureaux, bref, d’offrir un soutien à tous les niveaux et sur tous les types de projet.
Plus concrètement, on conseille sur des choix techniques, sur la définition d’une stratégie numérique sur cinq ans, sur la conception de schémas directeurs, mais aussi sur le pilotage d’un projet d’implémentation d’un nouvel outil, sur le développement d’un site web… Pour résumer, on est capable d’intervenir sur tout le spectre d’un projet informatique, de la conception la plus « vaporeuse » et long terme, jusqu’à la réalisation la plus pragmatique et ce, sur toutes les couches de leurs systèmes d’information.
M.R. : Mes connaissances en latin sont un peu lointaines mais « Ifingo », c’est un dérivé du terme latin « Fingum » qui signifie « imaginer, accompagner » ; c’est Xavier Sevin, le fondateur qui a trouvé ce nom et je trouve qu’il correspond parfaitement à notre mission : cet accompagnement est l’essence même de notre société !
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Si vous deviez vulgariser l’expression « transformation numérique » et en donner une définition, quelle serait-elle ?
M.R. : Pour commencer, je reviens sur cette histoire de « transformation » : on pourrait croire que nous n’intervenons qu’auprès des DSI, dans un champ limité d’actions … Or, « la transformation dans un monde numérique », pour moi, ce n’est plus une simple « transformation » mais une réelle « révolution » !
Au même titre que lors des révolutions industrielles, les entreprises sont obligées de passer par cette phase, et les DSI, qui étaient plutôt perçues comme des fonctions « supports » à l’origine, doivent actuellement être replacées au cœur même de l’entreprise. Ces DSI créent aujourd’hui de la valeur à travers des services numériques – applicatifs, applications métiers, digitale workplace… – et il est capital de mesurer cette valeur produite dans les organisations. Toutes les sociétés doivent ainsi se poser les questions : « ai-je fait ma révolution ? Est-elle en cours ? Par quelles étapes dois-je passer ? Quelles sont les technologies que je dois utiliser ? » ; c’est là qu’« Ifingo » intervient sur du conseil ou de l’opérationnel, en fonction de la maturité des organisations.
F.R. : « Transformation numérique » sous-entendrait qu’il y a un « point A » et un « point B » ; en fait, la « révolution numérique » est une affaire de « cycles » et donc d’évolution constante ! Elle est en mouvement perpétuel et on ne peut pas affirmer qu’on a « terminé sa transformation numérique » : c’est, en réalité, une façon de se réinventer au quotidien avec, entre autres, l’émergence de nouvelles technologies.
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Les DSI ont aujourd’hui un rôle prédominant dans l’entreprise et doivent devenir des services transverses qui irriguent chaque département des organisations. Comment intégrer cette notion de transversalité chez vos clients ?
F.R. : L’informatique n’est désormais plus une fonction support et c’est une des raisons pour lesquelles il est difficile de répondre à votre question ; en effet, il n’existe pas de réponse unique !
M.R. : Il faut se poser cette question pour chaque organisation : on ne peut pas déployer le même « kit méthodologique » pour chacune d’entre elle, bien au contraire ! La première chose, c’est l’humain : est-ce que les gens sont prêts à accepter le changement et sont capables de comprendre ce qu’on va leur proposer demain ? L’humain, c’est le facteur le plus compliqué : on ne peut pas faire sans et, en même temps, on doit obligatoirement se concentrer sur cette révolution numérique. Il faut donc, dans un premier temps, beaucoup investir sur ce volet humain au niveau de l’accompagnement, de la réorganisation de l’entreprise et pour ce faire, les approches agiles sont intéressantes car elles permettent de réajuster constamment la stratégie en mode « test and learn ».
F.R. : La partie « infrastructures » sous-tend cette révolution : elle répond à des problématiques de performance, de coûts et, bien sûr, de qualité, tout en étant orientée en fonction des besoins métiers, utilisateurs, des workflows etc. Ce n’est pas elle qui va conduire directement le changement.
Ce qui est important, c’est de partir de l’humain et des métiers, d’écouter leurs besoins pour trouver les meilleurs outils et faciliter la transition. C’est pour ces raisons qu’il n’existe pas de réponse uniformisée !
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Vous êtes donc présents en Calédonie depuis plus de 15 ans. Comment illustreriez-vous cette présence en chiffres clés ?
F.R. : Il y a quinze ans, « Ifingo » comptait deux collaborateurs puis, cinq à six en 2010. Puis, en 2020, nous étions quinze collaborateurs et, depuis deux ans, l’activité s’est encore accélérée puisque nous sommes vingt-cinq aujourd’hui…
En termes de clients, nous avons aujourd’hui une trentaine de clients actifs, principalement des grands comptes ou des institutions qui ont des besoins en numérique plus larges que les TPE / PME, même s’il nous arrive de collaborer avec des structures plus réduites.
Côté projets, nous avons notamment travaillé sur la mise en place du second câble sous-marin avec l’OPT-NC, sur la dématérialisation de la carte grise avec la DITTT, sur la refonte des systèmes « core banking » du Crédit Agricole Mutuel ou encore sur la transition de la DSI de Prony Ressources que nous accompagnons actuellement. Voilà quelques exemples parmi tant d’autres…
M.R. : Depuis quinze ans, « Ifingo » s’est créé un nom sur la place ; certains prospect nous contactent ainsi naturellement pour répondre à leurs problématiques numériques et, à mon sens, notre société jouit ainsi d’une belle image de marque, de qualité de prestation et a instauré de profondes relations de confiance avec ses clients.
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Avec le recul et votre expérience de ce marché, comment jugez-vous l’état de la « révolution » numérique de la Nouvelle-Calédonie ?
F.R. : En arrivant de Paris, j’étais plein d’a priori sur le niveau de transformation numérique de la Calédonie mais j’ai été agréablement surpris de voir que nous avons des acteurs d’un niveau technologique relativement élevé ; par exemple, l’OPT-NC respecte tous les standards internationaux en matière d’infrastructures informatiques et a pour volonté d’aller vers le Cloud, comme c’est le cas partout ailleurs, même s’il existe un peu de latence du fait de notre unique câble sous-marin et d’une réglementation complexe en terme d’hébergement, notamment avec l’Australie.
Pour autant, je constate que des démarches sont faites pour favoriser la révolution numérique de la Calédonie. Il ne me semble donc pas que la Calédonie ait dix ans de retard, comme on peut l’entendre et le lire parfois, ici et là…
M.R. : Rentré en Calédonie en 2013, j’ai rapidement intégré les services fiscaux et j’avais, à cette époque, l’impression que nous étions très innovants dans ce domaine en matière de dématérialisation, de télé-services comme la déclaration en ligne par exemple. Puis, après une légère stagnation au cours des quatre, cinq années suivantes, les choses se sont accélérées…
Aujourd’hui, il existe une belle communauté qui s’est créée autour de l’économie numérique avec plusieurs structures intéressantes comme l’ouverture de la Station N dernièrement, mais aussi le lancement de la FrenchTech NC ou l’activité du cluster numérique OPEN NC.
La récente restructuration de la DTSI en est une parfaite illustration : « DINUM » signifie « Direction Interne du Numérique et de la Modernisation ». Ça caractérise bien l’intention d’innover au travers des services numériques, non ? De plus, avec le second câble sous-marin, de nombreux projets vont voir le jour. Nous sommes sur la bonne voie !
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La transformation numérique ne touche pas que vos clients… On imagine volontiers qu’Ifingo a été également concerné par cette révolution et s’est réorganisé en interne. Quelles ont été les formes de cette (r)évolution ?
F.R. : Comme on l’a dit, nous sommes en pleine croissance et notre premier réflexe a été de se poser la question : au-delà du socle historique de nos activités, comment pourrait-on proposer d’autres services et réorganiser l’entreprise sous ces différentes offres ? Aujourd’hui, cette démarche repose sur ce fameux socle historique avec des consultants que l’on « professionnalise » mais également sur la construction de nouvelles offres, comme la mienne, une offre « infra » qui bénéficie de ses propres consultants et donc d’expertises spécifiques.
Par ailleurs, nous avons mis en place un mode de management très horizontal, sans trop de hiérarchie, avec, grosso modo, un gérant et des consultants ; en revanche, nous essayons de regrouper les collaborateurs par centre d’intérêt pour qu’ils puissent échanger et évoluer tous ensemble. Ce changement s’illustre par la mise à disposition et le développement de l’outil Teams sur lequel nous animons des canaux dédiés, des formations internes, échangeons des partages d’expérience et nous avons même créé une ligne rouge d’aide accessible à tous les consultants en cas de problème. L’idée, c’est de se diriger vers une entreprise qui « n’est pas une somme de consultants » mais qui prend la forme d’une communauté partageant une vision commune.
M.R. : Il faut bien comprendre que le quotidien d’un consultant « Ifingo », c’est d’être éparpillé en mission chez nos clients ! On a donc peu de temps ensemble pour créer cette vision commune et un esprit d’équipe. Dans la plupart des cas, nos collègues sont nos clients !
Depuis que nous sommes entrés au capital de la société, notre objectif est de développer un sentiment d’appartenance ; pour ce faire, nous avons mis en place des outils numériques comme l’évoquait Florent mais également des événements en format « afterwork », des soirées, et même un séminaire d’entreprise organisé il y a peu à l’îlot Maître. Pour nous, la « transformation » se trouve plutôt dans la création et l’animation de ce sentiment d’appartenance. L’important, c’est d’avoir une vision partagée qui nourrit la société toute entière !
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Votre page LinkedIn est une véritable mine d’or pour chercheurs d’emplois ! Quels sont actuellement vos manques en termes de ressources humaines et sont-ils les mêmes à l’échelle du territoire ?
F.R. : Je ne vais pas être très original mais on l’a tous vu : le COVID a été un frein au développement à l’échelle mondiale et, bien évidemment, le fait d’être en vase clos pendant deux ans a également touché la Calédonie. L’isolement a eu ses avantages sanitaires mais aussi ses inconvénients économiques… D’habitude, la Calédonie est une terre « d’arrivées et de départs », ce qui permet une rotation des expertises, ce qui a été impossible durant cette période. Le vivier de talents et de compétences s’est tari et nous manquons donc de profils adaptés à nos missions.
M.R. : Je dirais que notre contexte ilien n’aide pas ! Pour l’avoir vécu, les entreprises font assez peu confiance aux jeunes calédoniens diplômés ; pour ma part, j’ai dû retourner en France à la fin de mon stage de fin d’études pour trouver un emploi. Et même après cette année et demie, ça restait difficile de trouver un job car, dans le secteur de l’IT, les entreprises cherchent souvent des profils qui ont trois à cinq ans d’expérience et qui ont déjà pas mal de connaissances techniques car on n’a pas le temps de faire monter en compétences les jeunes diplômés.
Chez Ifingo, nous cherchons également ce genre de profils mais nous avons adapté nos recherches et nous sommes tournés vers des profils plus jeunes que l’on accompagne avec l’idée qu’ils resteront avec nous après cette formation.
D’autre part, nous avons aussi beaucoup de ressources calédoniennes qui restent en métropole et qu’on a du mal à faire revenir… C’est d’ailleurs l’un des objectifs de l’association « Talents Calédoniens » qui essaie de faire l’intermédiaire entre employeurs et diplômés.
Avec la sortie de la crise sanitaire, peut-être que ça va fonctionner et que de plus en plus de ressources « locales » diplômées et compétentes vont faire leur retour sur le territoire mais… une fois qu’on a connu la métropole et qu’on a commencé à travailler, est-ce que la Calédonie est toujours aussi attrayante ?
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La Calédonie manque-t-elle de main d’œuvre qualifiée dans le domaine du numérique et quelles solutions proposeriez-vous pour attirer des talents internationaux ?
M.R. : Il est assez clair que la Calédonie manque de visibilité à l’international et que nous devons faire comprendre à l’extérieur que nous n’avons pas dix ans de retard et que nous sommes prêts à les accueillir ! Certains récents reportages télévisés ont également exercé une influence positive sur notre visibilité : quelques anciens collègues m’ont appelé pour me dire qu’ils avaient vu ces reportages et que ça leur avait donné envie de venir !
F.R. : Vous savez, c’est même peut-être un mal plus profond… Quand j’étais en métropole, je n’avais aucune idée d’où était située la Calédonie et je crois que c’est encore le cas pour nombre de personnes. Espérons qu’avec les referendums, même si ce n’est pas une bonne publicité, on va voir un impact positif sur l’attractivité de notre territoire…
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Un dernier mot pour nos lecteurs ?
F.R. : Et bien, tout d’abord, merci à NeoTech de nous rencontrer et surtout, de nous écouter ! On parlait du développement de l’écosystème numérique et vous y contribuez pleinement donc ravis de faire partie de vos partenaires !
M.R. : Revoyons-nous dans un an pour analyser les résultats de toute la stratégie que nous avons commencé à mettre en place et, à ce moment-là, pourquoi ne pas interviewer certains de nos collaborateurs qui ont aussi beaucoup de choses à dire et qui seront, sans aucun doute, les meilleurs juges de notre travail quotidien !
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