1% de l’électricité mondiale pour 0,3% des émissions de CO2, c’est ce que représente aujourd’hui la consommation énergétique des datacenters ! Autant dire que l’impact écologique de vos mails et autres vidéos Youtube hébergées dans le cloud est diablement néfastes pour notre chère planète ! Pour éviter une consommation qui pourrait tripler d’ici 2030, ingénieurs et scientifiques travaillent actuellement sur des solutions alternatives plus écoresponsables. Voici quelques pistes et expérimentations pour reverdir l’activité des data centers

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Petite radiographie d’un data center avant l’exploration © La Tribune

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Sea Water Cooling, le SWAC a le SWAG 

Le SWAC est une technologie qui repose sur le pompage d’eau froide issue des mers et océans qui permet de produire de l’énergie thermique dédiée aux bâtiments, tels que les data centers ou hôpitaux par exemple. Concrètement, ce procédé, utilisé dès la fin du 19ème siècle pour la production d’énergie en régions tropicales, se base sur un système de refroidissement à l’eau froide (env. 5 degrés) qui permet de climatiser le data center immergé à une profondeur de 1000 mètres sous l’océan. 

Cette méthode a notamment fait l’objet d’un investissement d’environ 23 millions de la part du gouvernement de l’Île Maurice qui souhaite adopter ce procédé pour héberger les data centers d’entreprises internationales, telles que Schneider Electrics ou Orange, et bénéficier d’un avantage concurrentiel tiré de ses particularités insulaires. Dans cette configuration, le SWAC permettrait de réduire de 19% les coûts de consommation des centres de données. Quant à l’impact sur l’écosystème sous-marin, il reste aujourd’hui à discuter… 

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Le Water Cooling, eau et matériel informatique font bon ménage

Le Water Cooling est une méthode de refroidissement des serveurs par l’intermédiaire de l’eau qui est un moyen, entre 25 et 1000 fois plus efficace, pour transférer la chaleur ; l’idée est de réduire l’écart entre la source de production de chaleur, le processeur et l’air extérieur en amenant l’eau de refroidissement jusqu’aux armoires de serveurs pour refroidir directement le processeur. Un système efficace qui a déjà fait ses preuves malgré un risque de contact entre l’eau et le matériel informatique.

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Fonctionnement du “liquide cooling” d’un data center © Usité Technologies

Ce procédé a fait l’objet de plusieurs expérimentations, que ce soit chez OVH, Dell ou encore EBay ; Selon Dell, concepteur du système Triton, la solution limiterait la consommation d’eau, tout en réduisant l’énergie consommée par les systèmes de refroidissement à air traditionnel jusqu’à 97 %. Chez OVH, c’est une histoire de famille puisque ce procédé industriel a été breveté par le Henri Klaba, père de l’actuel DG, Octave Klaba et fait depuis l’objet d’optimisation et d’améliorations techniques constantes. 

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L’immersion alimentée en énergies renouvelables

Avez-vous déjà entendu parler du projet Natick lancé par Microsoft en 2015 ? Après un premier test concluant d’immersion d’un data center dans l’océan Pacifique pendant 105 jours, le géant américain a remis le couvert en 2018 en plongeant l’un de ses centres de données à 35 mètres de profondeur. Outre les avantages de gain en fiabilité – un taux d’échec qui n’atteint qu’un huitième de ce que Microsoft a constaté sur terre -, et en consommation énergétique, ce projet a également démontré qu’un data center immergé pouvait être alimenté en énergies renouvelables, qu’elles proviennent de l’éolien, de solaire ou de solutions expérimentales. 

Fort de ces deux réussites expérimentales, Microsoft est allé encore plus loin en testant l’immersion directe des serveurs dans un bain de liquide fluorocarboné porté à ébullition qui crée un mouvement de fluide permanent évacuant la chaleur des équipements, tout en atténuant le risque de pannes. Cette technique, inspirée des cryptomineurs, permet en outre de ne pas utiliser d’eau, une ressource naturelle qui doit également être préservée. 

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Oil Cooling, plutôt de l’huile que de l’eau ?

Un bon bain d’huile… Non, nous ne parlons pas de vos frites-maison baignées dans l’huile mais bien d’un procédé de refroidissement des serveurs par immersion dans une huile conçue à cet effet. En effet, l’air étant un très mauvais conducteur thermique, cette huile diélectrique – c’est-à-dire qu’elle ne conduit pas l’électricité – biodégradable permet de garder les serveurs au frais ; réchauffée au contact des ordinateurs, l’huile circule dans un échangeur thermique pour être refroidie et injectée à nouveau dans les réservoirs. Elle ne s’évapore donc pas et est garantie 25 ans, tout en évitant les problèmes liés à l’oxydation et à la poussière. 

Ce procédé révolutionnaire est actuellement commercialisé par l’entreprise « Immersion4 » grâce à une usine de production ouverte à Annecy en 2020. La SNCF, HP ou encore la ville de Las Vegas ont fait appel à ce service innovant. L’ « Ice Coolant », dont la recette est gardée précieusement secrète, a pour avantage de ne refroidir que les serveurs et non l’intégralité de la pièce : « Lorsque vous voulez refroidir une coupe de champagne, vous refroidissez toute la pièce ou seulement la coupe de champagne ? Les data centers traditionnels correspondent à la première solution, Immersion4 à la seconde », illustre le fondateur, Serge Conesa, au Figaro.

Drôle de coupe de champagne… © Clubic

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Recycler la chaleur produite, bienvenue dans la Smart City ! 

Dans cette dernière piste de « greenisation » des data centers, de plus en plus de dispositifs sont actuellement développés pour récupérer la chaleur produite ; alors que les différents processus de refroidissement représentent le poste de consommation énergétique le plus important, la récupération, directe ou par pompage, et la redistribution de cette chaleur vers l’alimentation d’autres bâtiments ou zones de vie paraît être un levier complémentaire de la réduction de l’empreinte écologique des centres de données. 

A Paris, le quartier nord « Chapelle International » bénéficie aujourd’hui en partie d’une alimentation produite par l’un des data center de la Ville de Paris qui favorise une consommation énergétique plus verte. C’est également le cas à Ferney-Genève, commune située à proximité de l’aéroport international de Genève et du quartier des organisations internationales – CERN, organisation européenne pour la recherche nucléaire… – qui a implanté un data center dont la chaleur alimente un réseau « d’anergie » pour chauffer les bâtiments résidentiels et tertiaire d’un nouveau quartier.

Le projet Terrinnov expliqué par © APL Data Center

A la différence des réseaux de chaleur classiques, le réseau d’anergie est un système de production d’énergie décentralisé et multidirectionnel qui permet l’échange d’énergie entre bâtiments en la stockant dans des sondes géothermiques l’été et la redistribuant lors des périodes de forte demande, en hiver. Un autre moyen de reverdir l’activité des centres de données en la redistribuant vers d’autres usages en fonction des saisons et de la chaleur environnante.

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Data centers écolo, du rêve à la réalité ?  

Alors qu’environ 2/3 de la population mondiale dispose aujourd’hui d’une connexion internet, l’empreinte écologique des data centers ne devrait faire que croître dans les années à venir, avec des projections globalement pessimistes. La recherche scientifique et l’innovation technologique sont actuellement des leviers essentiels pour réduire l’empreinte carbone et l’impact écologique des centres de données. 

La solution parfaite n’a pas encore été trouvée mais tous les géants de l’IT planchent actuellement sur le sujet. Comme la réduction de la consommation électrique des data centers est un enjeu bien plus économique qu’écologique, fort à parier que ces derniers finiront par trouver une solution idoine. Reste à savoir s’il ne sera pas déjà trop tard… 

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2/3 de la population mondiale a accès à une connexion internet… © Statista

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