(English version below)

Ce n’est un secret pour personne, fut-il perché sur un satellite Starlink, la région Pacifique subit de plein fouet les effets du changement climatique. Premier témoin de cette crise écologique mondiale, l’archipel de Tuvalu, hôte « virtuel » de la 13ème conférence de la Communauté du Pacifique, voit son l’érosion de son trait de côte meurtrir ses espoirs d’avenir et redéfinir le concept même d’« État » au sens juridique du terme. Pourtant, les « Pacific Islanders », accompagnés par l’organisation intergouvernementale, ont décidé de lutter avec une arme de protection massive : l’innovation technologique dopée aux données numériques. 

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“Nous sommes en train de couler” !

Alors que le CRGA livrait ses conclusions en « pacifico-vision », la 13ème conférence pouvait débuter et abriter les démonstrations et autres conférences scientifiques liées aux problématiques de ses états-membres. En ce vendredi 27 octobre de crachin breton, des sessions étaient ouvertes à la presse et aux visiteurs curieux d’en savoir plus sur l’avenir des territoires de leur région et, plus particulièrement de l’un d’entre eux donc, l’archipel de Tuvalu. Nous avions quitté M. Simon Kofe les pieds dans l’eau, dos à un îlot de Tuvalu, dans une vidéo pour la COP26 qui aura traversé le monde et aura été visionnée par près de 2,1 milliards de personnes ! Vendredi, nous l’avons retrouvé dans le jardin de la CPS, face à l’écran géant métaversé, en train de présenter le projet de « jumeau numérique » de l’état-archipel largement fragilisé par la montée des eaux. 

Un message cristallin © The Guardian

Aux côtés d’Alexander Schmidt, le chef de projet « Accenture », l’ancien ministre s’est exprimé sur le rôle des technologies et, notamment du métavers, pour préserver la culture de son pays et poursuive digitalement la transmission des connaissances traditionnelles aux jeunes générations. Quelques mètres plus loin, trois stations de réalité virtuelle (VR), étaient accessibles aux visiteurs pour tester la pratique.

Ni une, ni deux, casque sur la tête, notre journaliste a débarqué sur « Te Afualiku », le premier îlot à avoir été recréé virtuellement grâce aux images satellite, à des photos et à des plans de drone. Accueil en chansons locales, petit speech de bienvenue de Simon « himself » qui nous invite dans ce lieu où, plus jeune, il rejoignait sa famille pour pique-niquer, pêcher et chasser le crabe de cocotier, activités que l’on va successivement partager virtuellement avec lui. Bienvenue dans notre matrice du Pacifique ! 

Aussi ludique que soit la précédente démonstration technologique, elle représente pourtant un symbole fort, la « nation numérique », et soulève une question qui devrait agiter les cerveaux de la coopération internationale :

Comment rester un état souverain lorsqu’on perd l’une de ses principales caractéristiques juridiques, le territoire ?

Alors que Tuvalu acquiert actuellement des terres à Fidji aux en Nouvelle-Zélande pour héberger les futurs réfugiés climatiques, cette problématique demeure entière et les technologies numériques pourraient représenter l’une des réponses : et si le futur état de Tuvalu était ce fameux « digital twin » ? Quelles que soient les futures conclusions des instances internationales, le gouvernement de l’archipel a d’ores et déjà établi le numérique comme l’un des principaux axes de sa politique de « survie » face à l’urgence d’un territoire qui « coule ». 

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La DataViz au service de la sensibilisation et des décisions éclairées

Après ce petit tour dans le métavers, direction la bibliothèque de la CPS pour une présentation d’une maquette 3D de la capitale de Tuvalu, Funafuti ; bloquée entre lagon et océan, l’île centrale de l’archipel est confrontée à une montée des eaux qui grignote rapidement son trait de côte et aux inondations qui se succèdent. Les 7 000 habitants de la capitale ont littéralement les pieds dans l’eau et, une fois encore, la modélisation visuelle des différents scénarii fait froid dans le dos !

Ainsi, par petits groupes, visiteurs, partenaires et représentants des territoires du Pacifique ont pu constater les effets concrets de la montée des eaux selon divers paramétrages, en centimètres supplémentaires, mais également en fonction d’El Niño et de la Niña. Une dataviz animée dont les maisons rougies suggéraient les difficultés, puis l’impossibilité d’habiter le territoire dans les années à venir. 

« Dans ces conditions climatiques et avec une montée des eaux de 84 cm, le pire scénario, la population de Tuvalu ne pourra pas survivre ».

Rhonda Robinson, pessimiste…

Cette DataViz novatrice basée sur l’utilisation d’ensemble de données est aussi bien un outil de sensibilisation efficace qu’il est un argument d’action pour les décisionnaires en matière de sécurité de l’eau, d’inondations par les vagues, d’impact de l’élévation du niveau de la mer sur les communautés etc. La superposition de ces données permet d’obtenir une compréhension holistique qui favorise donc une prise de décision efficace. Ce travail, réalisé grâce aux « pouvoirs » des données, notamment de celles de la plateforme « Digital Earth Pacific », pourrait servir également nombre d’autres territoires insulaires exposés aux mêmes problématiques climatiques. Tester, dupliquer, scaler : l’un des enjeux futurs de ces projets “numérico-écolo” novateurs dans les géosciences

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Ouvéa, le prochain Tuvalu !

Tuvalu n’est (malheureusement) pas le seul territoire du Pacifique concerné par ces problématiques climatiques ! Néanmoins, au regard de l’urgence, l’atoll et ses dirigeants sont des précurseurs dans l’adaptation des usages numériques à la lutte contre le changement climatique. Qu’on se le dise, les données, l’innovation et les technologies sont des armes puissantes dans ce combat mais elles ne sont et ne seront jamais suffisantes si les consciences du monde entier ne sont pas alignées écologiquement vers des objectifs communs.

Alors que les pays développés sont responsables de 86% des gaz à effets de serre, c’est à l’autre bout du monde que les populations sont les plus touchées. Et pour en avoir une dernière confirmation, vous pouvez toujours aller discuter avec les 3 400 habitants d’Ouvéa… 


Technological innovation and data to the rescue of the Tuvalu archipelago

It’s no secret that the Pacific region is bearing the full brunt of climate change. The archipelago of Tuvalu, the “virtual” host of the 13th SPC’s conference, is the first to witness this global ecological crisis, as the erosion of its coastline threatens its hopes for the future and redefines the very concept of “state” in the legal sense of the term. However, the Pacific Islanders, supported by the intergovernmental organization, have decided to fight back with a weapon of mass protection: technological innovation boosted by digital data.

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“We are sinking” !

As the CRGA delivered its conclusions in “pacifico-vision”, the 13th conference got underway, hosting demonstrations and other scientific conferences linked to the issues facing its member states. On this drizzly Friday in Brittany, sessions were open to the press and to visitors curious to learn more about the future of the territories in their region, and more particularly of one of them, the archipelago of Tuvalu. We left Mr. Simon Kofe with his feet in the water, his back to a Tuvalu islet, in a video for COP26 that will have travelled the world and been viewed by nearly 2.1 billion people! On Friday, we found him back in SPC’s garden, facing the giant metaverse screen, presenting the project for a “digital twin” of the state weakened by rising sea levels.

Alongside Alexandre Schmidt, Accenture’s project manager, the former minister spoke about the role of technology, and in particular metavers, in preserving his country’s culture and digitally transmitting traditional knowledges to younger generations. A few meters further on, three virtual reality (VR) stations were available for visitors to try out. With headphones on, our journalist landed on “Te Afualiku“, the first islet to have been virtually recreated using satellite images, photos and drone shots. In this digital world, we were greeted with local songs and a short welcome from Simon “himself”, who invited us to the place where, when he was younger, he used to join his family for picnics, fishing and coconut crab hunting, activities that we will be sharing with him one after the other. Welcome to our Pacific matrix!

As playful as the previous technological demonstration was, it nevertheless represents a powerful symbol, the “digital nation“, and raises a question that should agitate the brains of international cooperation: how can you remain a sovereign state when you lose one of its main legal characteristics : territory? While Tuvalu is currently acquiring lands in Fiji and New Zealand to house future climate refugees, this issue remains unresolved, and digital technologies could represent one of the answers: what if the future state of Tuvalu was this famous “digital twin“? Whatever the future conclusions of international organizations, the archipelago’s government has already established digital technology as one of the main axes of its “survival” policy in the face of the urgency of a “sinking” territory.


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DataViz for awareness-raising and informed decision-making

After this little tour of the metaverse, we headed for the CPS library for a presentation of a 3D model of the capital of Tuvalu, Funafuti. Blocked between lagoon and ocean, the central island of the archipelago is confronted with rising waters that are rapidly eroding its coastline, and one flood after another. The capital’s 7,000 inhabitants literally have their feet in the water, and once again, the visual modeling of various scenarios is chilling! In small groups, visitors, partners and Pacific territories representant were able to see the tangible effects of rising sea levels, in centimeters, but also as a function of El Niño and La Niña for example. A live dataviz whose reddened houses suggested the difficulties, then the impossibility, of living in the region in the years to come.

“Under these climatic conditions, and with an 84 cm rise in water levels – the worst-case scenario – the population of Tuvalu will not be able to survive”.

Rhonda Robinson, pessimistic

This innovative dataset-based DataViz is both an effective awareness-raising tool and an argument for action for decision-makers in the fields of water security, wave inundation, the impact of sea-level rise on communities and more. Overlaying these data provides a holistic understanding, which promotes effective decision-making. This work, made possible by the “powers” of data, notably those of the “Data Earth Pacific” platform, could also be of use to many other island territories exposed to the same climatic issues. Testing, duplicating and scaling: one of the future challenges of these innovative “digi-ecological” projects in the geosciences.


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Ouvéa, the next Tuvalu !

Tuvalu is (unfortunately) not the only Pacific territory affected by climate change! Nevertheless, given the urgency of the situation, the atoll and its leaders are pioneers in adapting digital uses to the fight against climate change. Let’s face it, data, innovation and technologies are powerful weapons in this fight, but they are not – and never will be! – sufficient if the world’s consciences are not aligned ecologically towards common goals.

While developed countries are responsible for 86% of greenhouse gases, it’s at the other end of the world that people are most affected. And for final confirmation, you can always go and talk to the 3,400 inhabitants of Ouvéa


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