Trente-sept heures de débat en trois jours. C’est le temps qu’il a fallu au Parlement européen et au Conseil de l’Union européenne pour signer un accord politique provisoire concernant l’« AI Act » (Artificial Intelligence Act, soit Loi sur l’intelligence artificielle en français). Il s’agit de la première loi officielle sur cette technologie désormais largement utilisée. Cette législation vise à apporter une grande clarté juridique à l’utilisation de l’iA dans l’Union européenne. Ainsi, elle dicte des principes essentiels pour la création et l’utilisation des médias.

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Un projet qui ne date pas d’hier

L’histoire de l’AI Act a débuté timidement en 2021Cette législation d’envergure est un projet de l’Union européenne qui vise à réglementer l’utilisation de l’intelligence artificielle dans ses États membres. Toutefois, avec l’avènement des iA généralistes et génératives grand public telles que ChatGPT ou Midjourney, le rythme s’était accéléré. Alors, le 21 avril 2021, la Commission européenne a ouvert le bal en proposant un texte législatif, suivi d’une série de rebondissements jusqu’au 8 décembre dernier où un accord de principe a été trouvé par le Conseil de l’Union européenne. 

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Un nouvel allié au quotidien qu’il faut maîtriser © OPEN AI

Cependant, Emmanuel Macron avait alors exprimé des réserves sur les obligations de transparence. Il craignait que la divulgation des URL utilisées pour entraîner les iA ne révèle les « secrets de fabrication » des entreprises en concurrence. Toutefois, après diverses péripéties, une version amendée a été élaborée le 21 janvier dernier, pour finalement être officiellement signée le 2 février par les représentants des États membres, mettant ainsi un terme au voyage de l’AI Act. Les iA peuvent souffler, elles ont désormais des règles à suivre et peut-être quelques secrets de moins à garder.

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Les règles, tu suivras

L’objectif central est de garantir que les systèmes d’iA respectent les valeurs européennes fondamentales telles que l’éthique, la transparence et la responsabilité, tout en protégeant les droits des citoyens. Que le président se rassure, l’intention est de favoriser l’innovation en créant un environnement d’expérimentation contrôlé. Le projet de loi propose donc des règles claires pour encadrer l’utilisation de l’iA. Il prévoit également la création d’une « Agence européenne de l’iA » chargée de superviser et de faire respecter ces règles à travers l’UE. 

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Un tourbillon d’iA qu’il faut catégoriser

Ainsi, la régulation des intelligences artificielles repose sur une classification en quatre catégories, déterminées par le niveau de risque associé à chaque modèle :

  • Les systèmes à risque « inacceptable », comme ceux facilitant la manipulation cognitive, la notation sociale ou la reconnaissance biométrique en temps réel, seront interdits, avec certaines exceptions limitées pour des besoins d’application de la loi. 
  • Les systèmes à haut risque, impliquant notamment des produits réglementés par l’UE ou opérant dans des domaines sensibles tels que l’éducation, l’emploi ou les forces de l’ordre, nécessiteront une évaluation préalable avant leur mise sur le marché et tout au long de leur cycle de vie.
  • Pour les iA génératives à fort impact, une transparence accrue sera exigée. Notamment en indiquant que le contenu est généré par une iA, en prévenant la génération de contenu illégal et en publiant des résumés des données utilisées pour l’entraînement. 
  • Les systèmes à risque limité doivent respecter des exigences de transparence minimales pour permettre aux utilisateurs de prendre des décisions éclairées, notamment en les informant lors de leur interaction avec l’iA, ça les deepfakes ou les chatbots.

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L’espoir d’un effet domino

Cette législation ambitieuse positionne l’Union européenne à l’avant-garde de la réglementation de l’iA à l’échelle mondiale. Elle ouvre la voie à un cadre réglementaire robuste et éthique pour l’utilisation de cette technologie dans le futur. En adoptant des réglementations strictes, les nations du monde pourraient mieux se prémunir contre les scénarios dystopiques comme ceux décrits dans Black Mirror, tels que la manipulation sociale, la perte de vie privée ou encore le contrôle totalitaire exercé par des entités technologiques.

 « L’UE a déployé de gros efforts pour créer l’un des premiers cadres d’iA juridiquement contraignants. Cette législation constitue un grand pas en avant vers plus de transparence dans les systèmes d’iA, tout en soulignant également l’importance d’une utilisation et d’un fonctionnement responsables des outils d’iA. L’AI Act est une norme mondiale importante pour l’avenir. »

Wouter Gekiere, chef du bureau de Bruxelles de l’UER
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Il ne sert à rien de le nier, l’iA arrive et il faut la maîtriser

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