La Tech for Good qui s’est achevée il y a quelques semaines, a récompensé plusieurs entrepreneuses et entrepreneurs du Caillou. Parmi eux, une tête bien pleine, au prénom pas comme les autres – comme un indice que son avenir n’allait pas être comme celui de monsieur tout le monde. A 28 ans, Cyriaque Thomas a reçu le prix « DeepTech » pour son projet de prestation de service de paiements en ligne : Spirit.

Cet ancien ingénieur dans l’industriel ne craint pas de secouer un peu celles et ceux qui font la sieste sous le cocotier car, il le dit, il aime que les choses avancent. Nous l’avons rencontré en pleine phase d’accélération de son projet baptisé « Spirit » qui va « bousculer », il l’espère, le monde du e-commerce calédonien.

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Bonjour Cyriaque et merci de répondre à nos questions. Tu n’es pas un novice dans le monde de l’innovation, puisque tu es le co-fondateur d’une application que l’on connait bien : NeedEat. Peux-tu nous parler un peu de ton parcours qui t’a emmené jusqu’à cette volonté de créer Spirit ?

Spirit
Et le gagnant est…Spirit ! © NeoTech

Bonjour NeoTech ! Effectivement, l’application Need Eat a été créée en 2020 avec mon frère. Ensuite, il est parti au moment du lancement. Il est en train de finir ses études et je cogère en local l’exploitation. Pour comprendre, Need Eat c’est une plateforme de type marketplace, on recense des restaurants partenaires, qui vendent leurs produits sur notre plateforme et pour faire ce type de service, il existe des modules de paiements qui sont adaptés pour ce genre de plateforme et qui vont rediriger les flux financiers des clients. Quand le client va payer sur notre application, son paiement va être redirigé vers le restaurant dans lequel il paye ; ça, c’est un module de paiement de type marketplace et en Nouvelle-Calédonie, ça n’existe pas – en tout cas, ce n’est pas adapté à notre activité.

On a galéré pendant trois ans, à trouver des solutions de contournement mais qui ne sont pas forcément adaptées. Au début, on a pris un module de paiement e-commerce classique, sur lequel on recevait les paiements et après c’était à nous de redistribuer les paiements aux restaurants. Du coup, l’objectif c’était d’avoir une solution qui permet d’automatiser les flux de paiement vers chaque entreprise partenaire de la marketplace.

Nous sommes passés par un prestataire international – Stripe – mais en début d’année, ils ont décidé de couper les abonnements en Calédonie, donc ça ne marchait plus. Il n’y avait pratiquement plus de solutions qui existaient et c’est comme ça qu’on a eu l’idée de monter notre propre solution. 

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Spirit va donc s’adresser à des professionnels, à ceux qui veulent faire de la vente en ligne. Comment vas-tu t’y prendre pour créer Spirit et comment va-t-elle fonctionner ?

Nous nous sommes associés avec Lemonway, un prestataire de service de paiement français, qui a les licences pour exercer en Calédonie. Ceux sont des spécialistes des solutions marketplace. Nous avons négocié un contrat pour Need Eat avec eux et nous leur avons parlé de la création de Spirit. C’est à ce moment que l’idée a vraiment pris forme. Nous leur avons proposé de s’associer avec nous pour créer cette solution locale : Spirit.

Nous, ce qu’on va faire, c’est que l’on va créer une interface qui va nous permettre de proposer du paiement classique type e-commerce mais aussi marketplace – celle qui n’existe pas ici. Spirit inclut aussi la redirection des flux, les versements automatiques sur le compte bancaire… tous les services liés au paiement en ligne. 

Ensuite on va commercialiser cette solution et on va la proposer à des clients. Pour rappel, la CSB a un monopole sur le paiement en ligne actuellement donc il y a un besoin. Je pense qu’il est toujours sain d’avoir de la concurrence sur un marché donc ça ne nous faisait pas peur de proposer une solution alternative. Nous allons essayer d’avoir quelque chose de plus moderne que ce que propose la CSB – qui apparemment, travaille aussi sur une solution de marketplace. 

Pour un professionnel, par exemple, l’idée c’est qu’il pourra souscrire à un contrat en ligne. La plateforme fonctionnera comme n’importe quelle autre solution de paiement en ligne, afin qu’il puisse encaisser les paiements de ses clients. Nous utilisons des nouvelles technologies de codes qui vont nous permettre d’être vraiment réactifs dans les premiers mois qui suivront le lancement de Spirit afin de récolter les retours des clients tout en adaptant notre solution à leur problématique. Nous aimerions nous démarquer de la CSB en proposant quelque chose d’évolutif et de plus flexible.

Spirit
Team Spirit © Spirit

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Quelles sont les prochaines étapes pour que Spirit prenne vie ? Quelle est ton ambition à long terme ?

On a déjà fait toute la partie étude de projet, rédaction du cahier des charges etc. La deuxième partie du projet, on aimerait la lancer en novembre, c’est-à-dire le développement de la solution pour avoir une première version à la fin du premier trimestre 2024 et proposer une première version opérationnelle à nos clients au deuxième trimestre. A côté, on a déjà une roadmap de développement, avec des fonctionnalités qui arriveront dans un deuxième temps pour la version finale mais pour l’heure on aimerait lancer au plus vite une solution basique qui réponde aux besoins. On a identifié à peu près 300 entreprises e-commerces en lien avec la CSB mais on sait que c’est un secteur en plein essor et nous on mise sur récupérer ces parts de marché sur ses abonnements existants et prendre de nouveaux entrants qui arriveront.  

On part de zéro avec cet avantage de créer une solution sur-mesure, avec des dernières technologies. J’aime répondre à des problématiques complètes, tout ce qu’on fait c’est pour que ça serve à quelque chose. Notre envie, à mes frères et moi, c’est vraiment de faire évoluer la Calédonie ; ce n’est pas parce que l’on vit ici, qu’on est obligés d’avoir du retard sur ce qui se fait ailleurs. On aimerait que les gens s’approprient des nouvelles manières de fonctionner et des nouvelles technologies. Ici, c’est comme un gros bac à sable, on peut expérimenter des choses, c’est plus simple, car c’est à petite échelle. Il y a plein de choses à faire, et d’ailleurs on a encore plein d’autres idées pour la suite. 

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