Dans le cadre du « Tech4Good by NC », un appel à projet à destination des femmes entrepreneures du Caillou a été lancé par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. Trois thématiques étaient à l’honneur : « Women in Tech », « Tech for Women » et « Numérique et Inclusion ». Ainsi, le 1er décembre dernier, six prix ont été décernés à la Station N, en présence de Christopher Gygès, d’Isabelle Champmoreau et de Naïa Wateou (Province Sud).

Qui sont les lauréates et les projets qui se cachent derrière ces prix ? Pour cette première interview qui en amènera d’autres, nous sommes allés à la rencontre de Patricia Lauzes et Sophie Minet, lauréates, en duo, du prix « Tech for Women » pour leur projet “Femmes du Caillou” ; échanges nourris avec ces deux entrepreneuses, figures tutélaires de “la tech par des femmes, pour des femmes” !

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Une soirée haute en couleurs où les “tech-women” est à l’honneur © Tech4Good by NC

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Bonjour Patricia, bonjour Sophie et bienvenues sur NeoTech ! Première question : pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Sophie : Bonjour à tous ! J’ai exercé pendant dix-neuf ans en tant qu’enseignante spécialisée dans le primaire, tout en me formant à “l’art thérapie” (2017-2018) et à la biographie (2020-2021). Mon envie de changer de métier s’est imposée au fur et à mesure. J’ai sauté le pas en prenant une disponibilité de mon métier d’enseignante afin de me consacrer à une activité qui m’animait plus. Aussi, j’ai créé le site internetUne Vie en Prose” pour accompagner les personnes qui souhaitent écrire le récit de leur vie ou un événement en particulier. Passeuse de mémoire, je propose aussi mes services à des collectifs (entreprises, communes…).

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Raconter les histoires de ceux et celles qui font la Calédonie © Sophie Minet

Patricia : Bonjour à tous les lecteurs ! En ce qui me concerne, je suis architecte d’intérieur de formation et passionnée par le design en général. Mais j’aime par-dessus tout redonner vie aux choses anciennes. Je m’inspire fortement de l’environnement et de la culture locale pour imaginer et créer des décors ou des œuvres. Je suis arrivée sur le Caillou en 2009 après avoir vécu quelques années en Polynésie française. J’ai créé une agence de communication ici mais celle-ci ne me permet pas de m’exprimer artistiquement comme je le souhaiterais. Je me suis donc lancée dans un projet plus personnel et créatif : donner une seconde vie aux vieux clichés grâce à la technique du photomontage.

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Magnifier les personnes grâce au design digital © Patricia Lauzes

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Vous venez d’univers très différents mais vous voilà lauréates, en duo, de l’appel à projets Women In Tech. Comment vous êtes-vous rencontrées et pourquoi avoir répondu à cet appel à projet ?

Pour la création de mon site internet, j’ai fait appel aux services de Patricia, via son agence de communication Ylang Ylang. Nous avons en commun le goût des trésors du passé. En découvrant ses créations digitales réalisées à partir d’anciens clichés trouvés aux archives locales, j’ai eu envie de collaborer avec elle. Notre projet s’inscrivait bien dans les critères de Women in Tech : « féministe & digitale ». Nous y avons répondu de façon très spontanée en nous disant : « qui ne tente rien, n’a rien ».

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Des créations digitales à partir d’images d’archives pour valoriser l’histoire et la culture calédonienne © Patricia Lauzes

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Avec quelle idée avez-vous répondu à l’appel à projet Women In Tech du gouvernement de Nouvelle-Calédonie ? Pouvez-vous la présenter à nos lecteurs ?

Femmes du Caillou” est une plateforme digitale qui mettra en lumière 42 figures féminines emblématiques de la Nouvelle-Calédonie. Celles qui œuvrent ou qui ont œuvré dans divers domaines – social, environnemental ou culturel – et qui sont un exemple inspirant pour le territoire. L’idée est de les faire sortir de l’ombre en développant notre projet selon deux axes.

D’abord, il y a un objectif didactique clair. Nous souhaitons sensibiliser la population à l’histoire et au parcours de ces femmes en créant des supports en ligne gratuits : des podcasts, des mini-biographies, des jeux interactifs pour les enfants et des outils pédagogiques pour les scolaires. Cette plateforme digitale est conçue comme un outil collaboratif et nous souhaiterions proposer aux écoles des interventions sur l’égalité des genres en offrant aux jeunes des modèles féminins inspirants.

Pour le second axe, on retrouve le développement du e-commerce. Sur la (future) boutique en ligne de “Femmes du Caillou”, il sera possible d’acheter le jeu des 7 familles « Femmes du Caillou » créé par Patricia et moi, des produits dérivés à l’effigie des femmes : papeterie, créations artisanales et artistiques locales. Ainsi, chaque mois, l’une des 42 femmes sera mise à l’honneur par une artiste ou artisane locale qui vendra sa création en ligne.

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En quoi est-il important pour vous de valoriser l’entrepreneuriat féminin local ?

La Nouvelle-Calédonie fourmille de multiples talents – notamment féminins – qui ne sont pas assez mis en valeur. Il y a encore beaucoup à faire localement et le manque de parité en politique l’illustre bien. Heureusement, la société évolue de manière favorable dans ce sens. L’enjeu de “Femmes du Caillou” est aussi de faire rayonner à l’échelle internationale, grâce au numérique, les talents féminins du territoire.

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Vous avez donc remporté le prix Tech for Women. À quoi correspond-il et que représente-t-il pour votre projet ?

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© GNC

Très sincèrement, jamais nous n’aurions pensé que notre projet aurait pu être lauréat ! Avoir été retenu était déjà la preuve qu’il était digne d’intérêt. Remporter ce prix nous donne encore plus d’espoir. Au-delà de l’aide financière, c’est une marque de validation institutionnelle lui permettant de bénéficier d’une communication plus élargie.

Pour nous, le prix Tech for Women se présente comme un tremplin pour faire décoller le projet mais surtout comme un “booster” de carrière notamment pour moi (Sophie) qui vient de “switcher” professionnellement. Pour autant, nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers, il nous reste du pain sur la planche ! La première étape est de rencontrer des personnes susceptibles de monter des partenariats. Si ce projet fait écho à l’un de vos lecteurs, nous serions plus que ravies de discuter d’une possible collaboration.

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Si vous deviez partager des profils de femmes inspirantes avec nos lecteurs, quels seraient-ils et pourquoi ?

Frida Khalo, sans hésiter ! Son parcours de résilience incarne la force féminine. Le charisme de Michelle Obama est aussi inspirant. Ces deux femmes ont en commun de conserver leur authenticité, c’est ce qui les rend puissantes.

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“Women In Tech” est un mouvement international qui valorise les femmes dans l’univers de la tech. Où en est la Calédonie à ce niveau-là ?

Nous sommes assez optimistes : la Nouvelle-Calédonie semble être bien placée dans ce domaine. Le processus semble bien enclenché : la venue d’Inès Leonarduzzi organisée par la French Tech Nouvelle-Calédonie en est d’ailleurs un bon exemple. Espérons que des événements de cette envergure puissent se reproduire en Nouvelle-Calédonie, en imaginant même un congrès « Women in Tech by NC » ?

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© KIDS.NC

Si vous deviez présenter le portrait d’une Woman In Tech calédonienne, qui serait la première femme à vous venir à l’esprit ?

Sophie : En participant à Women in Tech, j’ai eu l’occasion de rencontrer Laurina Fong, lauréate du prix accélération Women in Tech. C’est une mère de famille, anciennement fonctionnaire elle aussi, qui s’est lancée dans l’entrepreneuriat. Elle a mis tous les moyens en œuvre pour que sa plateforme KIDS.NC se développe.

Je m’identifie à elle car je suis mère de trois enfants et je suis aussi en disponibilité de la fonction publique. Constater avec plaisir que son entreprise fructifie, ça me booste pour mettre toute mon énergie au service de “Femmes du Caillou”. C’est possible pour toutes les femmes de réussir dans l’entrepreneuriat, il faut y croire et y mettre beaucoup de volonté.

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Un dernier mot pour la fin ?

« Croyez en vos rêves, ils se réaliseront peut-être. Croyez en vous et ils se réaliseront sûrement »

Martin Luther King

La société patriarcale n’a pas optimisé la confiance en soi des femmes. Pourtant, les choses changent et le monde a besoin de nous ! Alors, allons-y maintenant, Mesdames, il est temps de prendre notre place !

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Un projet de promotion de la femme © Sophie Minet

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