C’est dans la bibliothèque de la Communauté du Pacifique que Sioeli Tonga, le manager du programme “Pacific Data Hub“, nous a reçu pour parler “data“. Chargé de développer et d’optimiser l’immense base de données de la CPS et de ses différentes divisions, Sioeli s’est confié sur une plateforme digitale unique en son genre puisqu’elle sert de passerelle vers des jeux de données issues des domaines clés du Pacifique : statistiques démographiques, science halieutique, adaptation au changement climatique, réduction des risques de catastrophe et résilience, conservation des ressources phytogénétiques pour la sécurité alimentaire, surveillance de la santé publique et droits de l’homme… Discussion avec un homme qui transforme des informations numériques en or décisionnel…

“Sio” vous passe le bonjour en direct de la CPS © NeoTech

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Bonjour Sioeli et bienvenu sur NeoTech ; pour débuter notre échange, pourrais-tu te présenter rapidement à nos lecteurs ? 

Bonjour NeoTech, merci pour cette opportunité de vous présenter mon travail. Je m’appelle Sioeli Tonga, je suis originaire des Tonga et suis le responsable du Programme « Pacific Data Hub » au sein de la Communauté du Pacifique (CPS) où je travaille depuis quatorze ans déjà. 

Mes expériences professionnelles se situent dans le domaine des technologies de l’information, des infrastructures et de l’ingénierie. Mon rôle est de renforcer les capacités de gestion des données au sein de la CPS et de gérer la plateforme « data » pour maximiser la valeur des données que nous récoltons, produisons et gérons.

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Quelles responsabilités occupes-tu à la CPS ? 

En tant que Program Manager pour le « Pacific Data Hub », je suis chargé de renforcer les capacités de notre organisation intergouvernementale en matière de données ; cela concerne le « data management », la gouvernance de la donnée, les technologies liées à l’exploitation des données, mais également les relations avec les parties prenantes. Mon rôle est de veiller à ce que nous soyons en mesure de gérer nos ressources de données de manière efficace et de fournir des services de qualité à nos pays membres.

Pour ce faire, nous disposons de deux ressources humaines dédiées ; moi-même et Stan Ozier, notre architecte solution, qui a pour rôle de d’optimiser notre plateforme afin de tirer le plus de valeur possible des données qui y sont intégrées. Notre rôle ressemble à celui de « data stewards » au service des pays membres de notre organisation.  

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Peux-tu nous en dire plus sur l’histoire du “Pacific Data Hub” et des utilisations qui en sont faites ? A qui est-il destiné ? 

Ça fait maintenant plus de 75 ans que la CPS génère une quantité astronomique de données ; nous avons aujourd’hui besoin d’organiser le stockage mais aussi l’organisation et l’exploitation de ces données afin d’en tirer de la valeur. 

Le « Pacific Data Hub » a été créé pour fournir une base de données centralisée et des informations permettant aux dirigeants et décideurs politiques des îles du Pacifique de prendre des décisions éclairées . Les organisations du secteur privé, les établissements universitaires, les écoles et les agences de développement font également partie des utilisateurs de la plateforme.

Pacific Data Hub
Quelques explications pour comprendre le fonctionnement de la plateforme © Pacific Data Hub – CPS

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Pourquoi les données sont-elles cruciales pour protéger nos environnement terrestres et maritimes ? 

Si je me place du point de vue de la CPS, c’est-à-dire d’une organisation de recherche scientifique, nous avons besoin de données structurées, de qualité, fiables et accessibles à tout un chacun, pour réaliser des analyses techniques et mesurer les impacts du changement climatique, tout aussi bien que les décisions qui sont prises pour protéger nos écosystèmes. 

Ces données sont donc capitales pour comprendre les effets de ces changements sur nos environnements, qu’ils soient terrestres ou marins, et pour prendre des décisions ; le rôle de la donnée est central dans la gestion scientifique et politique de nos environnements. 

Si on prend l’exemple de notre division « pêches », nous réalisons des études sur les stocks de thon dans le Pacifique : c’est la plus grande pêcherie du monde ! Il est donc crucial de gérer cette ressource car il s’agit d’une ressource précieuse et partagée par de nombreux territoires. Comme les thons sont une espèce migratrice, ils se déplacent d’un bout à l’autre de l’océan et nous avons besoin du concours de toutes les organisations de la région pour fournir les meilleures informations aux décideurs afin qu’ils puissent prendre des décisions adéquates pour protéger ces stocks de la surpêche par exemple. Voilà pourquoi les données sont capitales pour protéger l’environnement. 

Pacific Data Hub
Une carte pour télécharger des données géospatiales © Pacific Data Hub – CPS

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Pourrais-tu expliquer à nos lecteurs ce qu’est une donnée géospatiale ? 

Une donnée géospatiale est une donnée qui contient des informations sur une localisation, un emplacement ; il peut s’agir d’un nom de lieu, du nom d’une ville, d’un village, d’une île… mais il peut aussi s’agir d’informations plus spécifiques, comme l’étendue d’une zone géographique où une étude est réalisée… ou des coordonnées géographiques d’un point en particulier…

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Quelles sont les données que vous collectez à la CPS et à quoi servent-elles ? 

Vaste question ! La CPS collecte une grande variété de données provenant de différents secteurs tels que la gestion des pêches, la gestion des ressources foncières, l’éducation, la santé publique, l’égalité des genres, etc. Il existe donc un large éventail de domaines thématiques différents dans lesquels nous travaillons.

Récemment, dans le cadre de notre nouveau plan stratégique, nous nous sommes réorganisés pour nous concentrer sur quatre thématiques qui représentent des domaines transversaux : 

  • Le changement climatique,
  • Les océans, 
  • L’égalité des sexes, 
  • Les systèmes alimentaires. 

Il s’agit donc de thématiques qui recoupent de très nombreuses disciplines scientifiques et politiques issues de différents domaines. C’est pourquoi nous disposons d’un très large éventail de données que nous traitons dans de nombreux formats, de nombreuses normes, etc. 

C’est l’un des défis auxquels nous sommes confrontés lorsque nous travaillons dans un endroit comme la CPS : traduire, structurer, organiser et rendre accessible toutes les données scientifiques pour faciliter les prises de décisions « éclairées ». 

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Plus précisément, comme fonctionne le « Pacific Data Hub » ? 

Le « Pacific Data Hub » est, grosso modo, un catalogue en ligne qui permet d’effectuer une recherche centralisée des données. Par exemple, vous pouvez effectuer une recherche basique à l’aide de mots-clés pour trouver les données qui vous intéressent. En ce moment, nous travaillons à améliorer l’accessibilité de la plateforme et à mieux répondre aux besoins des utilisateurs. 

Le « Pacific Data Hub » soutient notre division « Statistiques » dans la gestion et la diffusion des données issues des recensements et des enquêtes menées et offre ainsi une plateforme de diffusion des statistiques officielles issues des recensements et des enquêtes sur les revenus et les dépenses des ménages etc. La bibliothèque de micro-données – « MicroData Library » – du « Pacific Data Hub » est le point d’accès aux données de recensement et d’enquête du Pacifique. 

Pacific Data Hub
Trouvez des informations en quelques clics… © Pacific Data Hub – CPS

Notre travail, c’est d’enregistrer et de documenter les informations sur les méthodologies employées et les instruments utilisés dans le cadre de ces enquêtes et autres études pour les rendre accessibles et compréhensibles aux publics qui ont le droit d’accéder à ces données qui sont parfois confidentielles et nécessitent de mettre en place des protocoles précis d’accessibilité. 

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Peux-tu nous expliquer comment rendre tous ces jeux de données compréhensibles pour les utilisateurs ? 

En un mot : « métadonnée » ! Les metadata sont de l’or ! Pour résumer, une « métadonnée » est une explication résumée d’un jeu de données qui permet de comprendre les données qu’il contient. Ce sont les « fiches d’identité » des jeux de données et il est donc nécessaire qu’elles soient à un bon niveau d’organisation pour qu’elles soient facilement accessibles et compréhensibles. 

Aujourd’hui, le « Pacific Data Hub » n’est pas encore parfait en matière de « métadonnées » ; c’est un défi que nous nous devons de relever en collaborant étroitement avec les producteurs et gestionnaires de données au sein de nos différentes divisions scientifiques afin d’élever le niveau de qualité de ces métadonnées. Globalement, même si toutes nos métadonnées ne sont pas parfaites, au moins, les jeux de données sont accessibles ce qui reste le plus important ! 

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Un dernier mot ou une dernière actualité pour nos lecteurs ? 

Dans le cadre de la prochaine phase de notre programme de travail, nous cherchons à accroître nos niveaux d’engagement avec nos états membres, avec les pays et les gouvernements des îles du Pacifique. Nous cherchons également à renforcer notre engagement auprès du grand public. 

Dans ce contexte, l’une des initiatives que nous avons lancée l’année dernière, le « Pacific Data Viz Challenge 2024 », a pour objectif de rendre visuellement compréhensible des jeux de données pour en promouvoir l’adoption et l’utilisation ; l’objectif de ce programme international, c’est de raconter une histoire grâce à des données précises. C’est un projet qui a vu le jour l’année dernière, en collaboration avec la DINUM et le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et que nous reproduisons cette année. Une communication autour de ce concours aura bientôt lieu : restez connectés ! 

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