On décode la tech’ – épisode #3
« Blockchain », « IA », « deep learning », « ransomware »… Le monde de la tech a son propre jargon et ses concepts qui, soyons honnêtes, laissent parfois un peu perplexe. Même si ces technologies font désormais partie de notre quotidien, leur fonctionnement reste souvent un mystère pour beaucoup (y compris vous, ne mentez pas). Dans cette série, nous retroussons nos manches en vulgarisant certaines de ces notions pour en comprendre l’essentiel. Alors, que vous soyez un geek en devenir ou un néophyte un peu perdu, embarquez avec nous dans les fascinants méandres de la tech’ !
Lorsqu’on parle de bitcoin, on pense souvent à une monnaie numérique, à une révolution financière ou à un symbole d’émancipation face aux institutions traditionnelles. Mais derrière cet aspect purement économique se dissimule une énigme digne des meilleurs thrillers technologiques. Celle de Satoshi Nakamoto. Un nom, un document fondateur, et pourtant, encore aujourd’hui, personne ne sait qui se cache de l’autre côté de l’écran. Une ombre plane sur l’origine du bitcoin, alimentant un mystère 2.0 qui continue de faire couler beaucoup d’encre (et de pixels) sur la toile…
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Sato qui ?
Octobre 2008. Alors qu’une tempête financière mondiale fait rage, un document énigmatique circule sur une liste de diffusion de cryptographes. Son titre ? « Bitcoin: a peer-to-peer electronic cash system ». Derrière ce livre blanc désormais légendaire, se trouve un nom. Satoshi Nakamoto. Un pseudonyme mystérieux qui se présente comme un japonais né en 1975. Mais au fond, personne ne sait vraiment qui se cache derrière cet alias. Ce que l’on sait en revanche, c’est que ce document pose les fondations d’un système de paiement électronique entièrement décentralisé, sans banque ni autorité centrale. Une petite révolution qui a de quoi faire trembler Wall Street…

Quelques mois plus tard, le 3 janvier 2009, Satoshi lance le premier logiciel bitcoin en créant le bloc Genesis, le tout premier bloc de la blockchain et point de départ de cette cryptomonnaie. Si on simplifie, cette technologie est une sorte de registre numérique décentralisé et infalsifiable qui enregistre de manière transparente et sécurisée l’ensemble des transactions entre utilisateurs et ce, sans intermédiaire bancaire. Peu après, la première transaction en bitcoin a lieu. Depuis, cette monnaie virtuelle s’est imposée dans le paysage économique mondial, évoluant progressivement grâce à une communauté crypto passionnée. Mais alors que ce projet commence à prendre son envol, son créateur, lui, s’efface peu à peu dans l’ombre…
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C’est votre dernier mot ?
En décembre 2010, le mystère s’épaissit… Satoshi publie un message technique sur le « Bitcoin Forum », apportant un correctif au logiciel. Puis… plus rien. Le 23 avril 2011, il adresse un dernier mail au développeur Mike Hearn pour lui annoncer qu’il passait le relais. Depuis, silence radio. Aucune trace virtuelle, aucune vidéo, aucun signe de vie. D’après les informations laissées sur son ancien profil de la Fondation P2P, Satoshi aurait fêté ses 50 ans le 5 avril dernier. Mais malgré des enquêteurs 2.0 ultra investis dans leurs recherches aucun indice tangible n’a encore été déterré.

Pourtant en 2014, un article de Newsweek crée l’effervescence en affirmant que Satoshi Nakamoto ne serait autre que Dorian Nakamoto, un ingénieur américain d’origine japonaise. Harcelé par les médias et la communauté crypto, l’homme nie catégoriquement être le créateur du bitcoin. Après enquête, la piste est abandonnée. Retour à la case départ.

En parallèle, les spéculations vont bon train. Certains avancent le nom de Nick Szabo, pionnier de la cryptographie. Hal Finney, un informaticien et premier à avoir reçu une transaction bitcoin, est également cité. Quelques-uns ont même revendiqué ce titre sans jamais convaincre ni la justice, ni la communauté crypto. Alors, est-ce un génie solitaire ou un groupe d’experts opérant sous pseudonyme ? Rien n’est tranché. Mais ce qui est sûr, c’est que le mystère alimente la légende (et la curiosité).
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Le retour du Jedi ?
Derrière de Satoshi Nakamoto se cache aussi une fortune colossale. Avec près d’un million de bitcoins minés à ses débuts (et jamais dépensés) la valeur de son portefeuille atteindrait aujourd’hui plusieurs dizaines de milliards de dollars, le propulsant dans le top des fortunes mondiales. Et pourtant… pas une seule pièce n’a été déplacée depuis 2009…
Cependant l’arrivée des ordinateurs quantiques pourrait bien pousser Satoshi à sortir de l’ombre. Actuellement, le bitcoin repose sur un système de cryptographie où chaque utilisateur possède une clé publique (visible sur la blockchain) et une clé privée (secrète), indispensable pour valider une transaction. Tant que cette clé privée reste secrète, les fonds sont à l’abri. Avec les ordinateurs actuels, briser ce chiffrement est quasiment impossible. Mais les ordinateurs quantiques, que développent notamment Google ou Microsoft, pourraient bien bouleverser la donne. Grâce à leur puissance de calcul, ils seraient capables, en théorie, de déduire une clé privée à partir de sa clé publique… mettant en péril les portefeuilles de cryptomonnaie.

Un scénario catastrophe qui placerait les bitcoins en grand danger. Ce risque pourrait bien forcer le mystérieux créateur à sortir du silence à supposer, bien sûr, qu’il soit toujours en vie. Ou qu’il ait prévu la relève…
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L’anonymat comme résistance ?
Mais pourquoi un cet anonymat et cette disparition ? Aucune explication officielle n’a jamais été donnée, mais cette absence de réponse ne serait-elle pas son message le plus fort ? Dans un monde où l’ego, la notoriété et la quête de pouvoir dictent souvent les règles du jeu, cette disparition volontaire résonne comme une révolution silencieuse. Refuser de rentrer dans ces cases c’est aussi affirmer une autre vision du progrès. Une vision où l’idée prévaut sur l’ego et où l’innovation appartient à tous et non à un nom.
Ce qui est certain, c’est que Satoshi Nakamoto demeure l’un des plus grands mystères contemporains. Et peut-être est-ce là tout l’intérêt. Car plus que son identité, c’est son héritage qui compte. Celui d’un monde où l’anonymat peut être un acte politique et où une idée, même sans visage, peut ébranler les fondations d’un système.
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