« 20% des Calédoniens n’ont pas ou peu d’accès aux outils numériques ! » Le Baromètre Numérique 2018 de l’ONNC soulignait ainsi une forme inquiétante de fracture numérique sur le territoire. Dans ce contexte, le programme Case numérique®, créé en 2016 par le gouvernement, est un outil efficace pour faciliter l’inclusion numérique des populations fragilisées. Retour sur cette démarche éthique, solidaire et sociale.
Case numérique®, lutter contre l’illectronisme
Le principal objectif du programme « Case numérique® » est de lutter contre l’illectronisme qui sévit sur le territoire, tout en créant du lien social, en encourageant à la participation citoyenne et en accompagnant les acteurs de l’économie locale dans la compréhension et la manipulation des outils numériques. L’autre facette de cette action sociale vise à identifier, mettre en réseau puis labelliser les « Espaces Publics Numériques » (EPN) présents en Calédonie et qui sont la « main armée » du dispositif d’accompagnement des populations atteintes par la transformation digitale de l’économie locale.
Ouverts à tous et gratuits, ces EPN sont animés par des animateurs spécialisés et encadrés par un gestionnaire – collectivité ou association ; autrefois appelés « cyberbases », ces espaces d’accueil ont pour mission d’initier et d’accompagner les populations à l’usage du numérique. A ce jour, une trentaine d’EPN ont été identifiés – 9 en Province Nord, 4 en Province des Îles et 10 en Province Sud – mais seulement cinq ont bénéficié de cette labellisation alors que quatorze autres sont en cours. Ce réseau d’EPN a malheureusement subi de plein fouet la crise sanitaire qui a fragilisé son statut et celui de ses médiateurs numériques actuellement en cruel manque de reconnaissance : aucun statut officiel, aucune formation ouverte, ni aucun diplôme disponible sur le territoire à l’heure actuelle.
Un combat civique contre la fracture numérique
« Depuis 2020 et l’arrivée de la crise sanitaire, le programme « Case numérique® » est fortement ralenti… », confirme Paul Barri, Responsable de la Médiathèque de Boulari et de la Case numérique, « et 12% de la population calédonienne est touchée par la fracture numérique ! », complète-t-il tristement. Les actions menées par ces bienfaiteurs numériques sont larges et s’adaptent en fonction du profil des publics – seniors, personnes en situation de handicap, jeunes, demandeurs d’emplois, PME et patentés, associations – en proposant plusieurs dispositifs tels que des ateliers d’initiation à l’informatique, d’accompagnement à l’e-administration ou encore de sensibilisation aux dangers du web.
Au-delà de ces ateliers, le réseau EPN NC porte également de nombreux projets numériques ; en 2019, le projet « Sem@ines Numériques » a embarqué 7 EPN, animé une dizaine d’ateliers par semaine pendant les six semaines comprises entre avril et septembre et abordé des thématiques centrales dans la compréhension de l’environnement numérique. Le projet « Semaine C@lédonumérique » ou encore les trois séminaires EPN organisés par le gouvernement en mars, juillet et septembre, à destination des animateurs pour faciliter leur montée en compétences sont des réalisations concrètes portées par le réseau. Autant d’actions civiques à destination des populations les plus touchées par la fracture numérique.
Une transformation numérique à plusieurs étages
« Cette fracture numérique va souvent de pair avec la fracture sociale », commente « Pablo » qui organise lui-même nombre d’ateliers à la Case numérique du Mont Dore. « La fréquentation de nos EPN a fortement augmenté depuis leur création et, encore plus depuis la mise en place des demandes de bourses que la Province a 100% digitalisée ». Dans cette optique, l’utilisation du service d’« e-administration » devient complexe : pas d’adresse mail personnelle, une mauvaise compréhension du parcours utilisateur ou encore le sentiment « d’être en marge » sont autant de freins qui se dressent comme des remparts face à l’usage numérique.
« Par ailleurs, on constate aussi une évolution significative des plaintes pour harcèlement sur les réseaux sociaux calédoniens. On constate que la plupart des Calédoniens ne savent pas que les droits et devoirs d’un citoyen en ligne sont les mêmes que dans la vraie vie ! », tempête Paul. Qu’ils soient jeunes ou plus âgés, les Calédoniens doivent ainsi être « éduqués » à une utilisation correcte des réseaux sociaux. Les EPN représentent alors les dernières barrières à la création d’une société numérique à deux vitesses et permettent en outre de sensibiliser la population, notamment autour des dangers du net, tels que le harcèlement et la haine en ligne ou encore le hameçonnage. Et cette fois, on ne parle pas de pêche !