Qui mieux qu’une fédération d’entreprises pour représenter les patrons de tous horizons ? Nous sommes allés à la rencontre de la présidente du MEDEF de Nouvelle-Calédonie, Mimsy Daly afin de discuter de son action sur le territoire : investissement dans le projet “Woman in Tech”, accompagnement des entrepreneurs de toutes tailles et de tous secteurs d’activité, défense de leurs droits… À cette occasion, la présidente nous livre aussi son ressenti sur le numérique et l’innovation en Nouvelle-Calédonie. Une belle manière de découvrir les actions de la fédération pour la transition numérique du Caillou.

Rencontre avec Mimsy Daly, Présidente du MEDEF-NC © NeoTech

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Bonjour Mimsy et bienvenue sur NeoTech ; pour commencer notre échange, pourrais-tu te présenter à nos lecteurs ainsi que le MEDEF-NC dont tu es la Présidente ?

Bonjour NeoTech ! Je m’appelle Mimsy Daly et, en effet, je suis actuellement la Présidente du MEDEF de Nouvelle-Calédonie ; par ailleurs, je suis commerçante dans l’ameublement et la décoration à Nouméa.

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© MEDEF-NC

Le MEDEF-NC est la première fédération patronale du territoire qui représente près de 1500 entreprises avec 26 syndicats professionnels qui lui sont affiliés ; ainsi, nous représentons un très large panel d’entreprises calédoniennes, des grandes comme des TPE / PME lesquelles constituent 90% de nos adhérents. Cette répartition est finalement synchrone et assez représentative du tissu économique calédonien.

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La Présidente au salon DIGI EXPO © MEDEF-NC

Le MEDEF-NC soutient un certain nombre d’événement liés à l’innovation technologique et au numérique – DIGI EXPO, AAP Women in Tech etc… Quelle est votre position à l’égard de l’écosystème « numérique » de la Nouvelle-Calédonie ?

Le MEDEF-NC est un précurseur au soutien de ce secteur d’activité ! Il y a de ça quelques années, nous étions à l’origine de l’événement DIGINOVA par exemple…

Les raisons sont multiples et, la première d’entre elles, c’est que le numérique est un véritable levier de compétitivité pour le monde économique calédonien, à plus forte raison parce que nous sommes une île : il nous semble donc fondamental d’avancer dans cette direction. En tant que fédération patronale, notre rôle est de mettre en relation, de promouvoir, de fédérer autour de cette thématique pour en faciliter l’accès au plus grand nombre.

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On t’a entendu soutenir l’appel à projet « Women in Tech » porté par le GNC lors de la récente conférence de presse organisée à la Station N. Pourquoi soutenir cet événement ?

Notre objectif, c’est de porter plus haut ces messages de promotion de l’espace numérique, en particulier en faveur des femmes ; aujourd’hui, le MEDEF-NC est engagé en faveur de l’entrepreneuriat féminin pour des raisons de « rééquilibrage » de notre monde économique mais également d’émancipation des femmes : il y a une logique de responsabilité sociétale des entreprises derrière nos actions.

Par ailleurs, il me semble que le numérique en est un parfait vecteur car il permet aux femmes – aux hommes également – d’accéder à l’entrepreneuriat, même à des endroits très reculés de la Nouvelle-Calédonie. En outre, à peu de frais, il facilite l’offre de biens et de services et les femmes ont beaucoup à gagner en investissant ce secteur et celui des technologies !

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Le MEDEF-NC était également un partenaire privilégié de l’Observatoire numérique de Nouvelle-Calédonie qui vient d’annoncer sa fermeture. Quel est ton ressenti face à la disparition de cet acteur du numérique ?

L’ONNC a permis de faire parler du numérique en Calédonie et nous sommes très fiers d’avoir été à l’origine de ce dispositif avec certains de nos adhérents ! Aujourd’hui, on constate que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et nos élus s’emparent – enfin ! – de cette thématique « numérique ».

Nous sommes attentifs à tous les dispositifs qui vont dans ce sens et on considère que si les pouvoirs publics prennent le relais et amplifient le message, nous aurons atteint notre objectif… ce qui n’empêchera certainement pas le MEDEF-NC de rester partenaire de l’ensemble des actions associées à cette thématique ! Nous continuerons par ailleurs, via la fédération de nos adhérents du numérique qui sont nombreux, à porter ces messages de soutien en tant que fédération patronale représentative.

Récemment, nous nous sommes d’ailleurs opposés frontalement à la volonté politique de taxer les produits numériques : c’était une aberration totale dans le contexte actuel et c’était notre rôle de s’y opposer. Pour aller plus loin, en ce qui nous concerne, nous sommes très favorables à la création de partenariats « public – privé » que nous encourageons et appelons de nos vœux.

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Vous disposez d’une « fédération du numérique » interne ?

Oui ! Enfin, plus précisément d’une commission « numérique » qui embarque les adhérents du numérique, les syndicats professionnels qui gèrent le numérique : c’est important d’être prêt à répondre aux sollicitations, à la fois des pouvoirs publics, mais également de pouvoir formuler des propositions adéquates.

Nous avons été consultés sur un certain nombre de dossiers ; par exemple, nous avons échangé avec l’OPT sur sa stratégie car je considère que le numérique est une filière prioritaire ; ainsi, nous sommes structurés pour répondre à toutes les questions qui peuvent permettre son développement.

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En quoi le numérique est-il aujourd’hui un outil incontournable pour les chefs d’entreprise du territoire ?

Même si ça a déjà été dit, je crois que la crise sanitaire a accéléré la transition numérique de notre économie puisque le numérique était littéralement devenu un outil de survie pour un certain nombre d’activités !

Aujourd’hui, je crois que de nombreuses entreprises l’ont intégré dans leur dispositif structurel, dans leurs fonctions « support » par exemple – RH, finance, comptabilité… – mais également dans leurs outils commerciaux, via les réseaux sociaux mais également leur interface web et autres plateformes de vente en ligne.

Néanmoins, il reste encore beaucoup à faire… Nos demandes s’adressent souvent à l’administration car la nécessité de poursuivre, et même d’accélérer la transition numérique de nos administrations ou encore de la CAFAT, notre système de santé, est omniprésente ! On peut également mentionner la partie « création d’entreprise » : en 2022, on est encore obligé de remplir dix feuillets, de se déplacer trois fois et de faire dix chèques pour créer sa société ! Ce n’est pas possible… Autre exemple, nous continuons à utiliser des chèques en Nouvelle-Calédonie alors qu’aujourd’hui, on pourrait largement avoir fait une transition vers les outils de paiement numérique… Nous sommes très en retard, il ne faut pas se voiler la face. Maintenant, tout ce qui sera fait dans ce sens permettra de réduire les coûts et nos entreprises ont besoin de réduire leurs coûts d’exploitation : le numérique doit les y aider !

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Le MEDEF comme soutien à la transition numérique du Caillou © MEDEF-NC

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Le secteur du numérique calédonien se développe doucement mais ne représente encore qu’un petit pourcentage du PIB de notre territoire. Selon toi, quelles actions doivent être menées pour lui permettre d’être un levier de croissance économique plus puissant ?

Là encore, les pouvoirs publics jouent un rôle déterminant ! Le coût d’accès au numérique et, notamment à l’internet et à la téléphonie, est bien trop élevé sur notre territoire. On le dit, on le répète mais le modèle actuel utilise le numérique pour financer des systèmes relativement obsolètes de poste, etc… Il faut accélérer cette transition ; je ne dis pas que c’est simple mais il faut se préparer à pouvoir offrir aux entrepreneurs et à tous les Calédoniens un accès beaucoup moins cher au numérique.

D’autre part, le numérique doit infuser dans tous nos process, qu’ils soient administratifs ou internes aux entreprises : les chefs d’entreprise doivent s’habituer à déclarer numériquement les paies, les impôts… Ca fait évidemment partie de notre rôle de sensibiliser et vulgariser ces usages mais c’est à ce prix que nous allons simplifier et assainir nos politiques économiques, nos outils de contrôle et de surveillance, afin d’optimiser le fonctionnement d’un certain nombre de domaines ; aujourd’hui, la Calédonie en a vraiment besoin !

Actuellement, on réalise que certaines réformes sont bloquées à cause de l’absence d’outils numériques ou de leur obsolescence : il est fondamental de réaliser ces investissements structurants dans un grand nombre de domaines pour l’avenir du Caillou… Aussi, je lance un véritable appel aux pouvoirs publics : il est urgent d’accélérer la transition numérique de la Nouvelle-Calédonie !

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Aurais-tu un exemple de blocage d’une réforme à cause de cette problématique ?

Et bien oui, la CAFAT dont je vous parlais un peu plus tôt ; le système d’information de la CAFAT est notoirement obsolète et il interdit un grand nombre d’évolutions dans le pilotage de notre système de santé. C’est typiquement un chantier qui doit s’ouvrir ! Sans une modernisation rapide de ces outils de pilotage, nous ne pourrons pas optimiser les dépenses de santé, voire la qualité des services que la CAFAT doit aux entreprises et aux particuliers.

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Est-ce que cette problématique globale provient d’un manque de compétences sur le territoire, d’un défaut de la formation initiale ou professionnelle ? Quels sont les échos des chefs d’entreprise à ce sujet ?

Le numérique est effectivement un secteur qui souffre actuellement d’un manque de compétences localement ; certains projets, comme la transition numérique de la CAFAT que je viens d’évoquer, sont difficiles à réaliser par manque de compétences locales : on est obligé d’aller sourcer à l’extérieur des ingénieurs SI pour mener à bien ce type de projets…

Cette pénurie de main d’œuvre qualifiée touche de nombreux secteurs mais, en ce qui concerne tout particulièrement le numérique, on a besoin de mieux cibler la formation de nos jeunes vers ces secteurs d’avenir ; aujourd’hui, les dispositifs d’aide à la formation doivent se concentrer sur ces secteurs et, en parallèle, nous devons faire venir de la compétence et ce, le plus rapidement possible ! La transition numérique, c’est maintenant !

Certaines associations comme Talents Calédoniens font beaucoup pour résoudre ce problème mais ce sont des initiatives privées ; au MEDEF-NC, notre suggestion, c’est que la Maison de la Nouvelle-Calédonie devienne l’ambassadeur de notre recrutement des talents, notamment en métropole ; il faut que nous puissions jouir de relais à l’échelle nationale pour promouvoir la Nouvelle-Calédonie comme une destination pour les travailleurs qualifiés : la Maison de la Nouvelle-Calédonie pourrait, par exemple, jouer ce rôle…

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Le MEDEF-NC est là pour encompagner les chefs d’entreprise, mais aussi pour aider à la découverte de talents locaux © MEDEF-NC

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Pour terminer sur une note positive, quelle est ta vision de la transformation numérique du tissu économique calédonien et quelles opportunités as-tu identifié ?

Je crois que les entrepreneurs calédoniens sont prêts ! On le voit à travers leur faculté d’adaptation aux évolutions numériques et technologiques qui ont eu lieu ces dernières années ; je pense par exemple aux réseaux sociaux et je crois que nous avons une réelle appétence pour ces moyens de communication modernes.

Encore une fois, il est évident que les initiatives privées font avancer les choses mais l’accélération des initiatives publiques en la matière est fondamentale parce que ce sont ces dernières qui vont permettre de raccrocher les dernières entreprises qui ne sont pas encore montées dans le train du « numérique » ! A partir du moment ou un certain nombre de procédures administratives seront définitivement numérisées, disons à échéance 2025, nous pourrons enfin parler d’avancée conséquente de notre transformation numérique, même si cette dernière est continue dans nombre de domaines…

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Un dernier mot ou une dernière actualité pour la fin ?

Avec plaisir ! Comme c’est d’actualité, je relance un appel aux femmes : portez des projets pour « Women in Tech » car c’est important pour la Calédonie et que c’est une belle initiative pour vous donner de la visibilité et vous aider à franchir cette dernière étape vers une plus grande autonomie. Appel lancé et RDV sur le site dédié !

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La Présidente du MEDEF-NC est marraine du projet “Woman in Tech” sur le Caillou ! © NeoTech

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