Longtemps cantonnées à l’univers de la science-fiction, les mobilités innovantes se fraient petit à petit un chemin dans la réalité de nos quotidiens. Avec le développement des mobilités électriques et des nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle (IA), le fantasme de la voiture autonome semble plus proche de se concrétiser que jamais.

Ainsi, les investissements dans le secteur se multiplient et les constructeurs automobiles se voient contraints d’adapter leurs gammes aux nouveaux systèmes d’information. Pourtant l’enjeu ne se trouve pas uniquement autour de ces gadgets mais bien dans l’adaptabilité du secteur à la réalité de nos mobilités. Dans cette optique, un premier axe de réflexion émerge :  quel avenir pour la voiture autonome ? Coincée entre rêve et réalité, quels enjeux sous-tendent cette mobilité nouvelle ?

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La voiture autonome : quand le rêve devient innovation

La voiture autonome est probablement l’une des innovations qui génèrent le plus d’enthousiasme ces dernières années. Capable de circuler sans intervention humaine sur une route ouverte, il faut dire qu’elle a de quoi faire rêver les conducteurs facilement distraits tout en promettant d’optimiser la mobilité de ceux qui ne peuvent se passer des quatre roues pour se déplacer. Les premiers essais remontent – déjà – aux années 1970 au Japon. Pourtant, ce n’est véritablement que durant la décennie 2010 que ce sujet devient médiatique, notamment quand Google annonce travailler sur cette technologie. Depuis, les géants issus des GAFAM investissent massivement… Spoiler alert : ils ne sont pas les seuls ! Le marché pullule de fabricants de processeurs, de fournisseurs d’écrans, de spécialistes en télécommunications, d’experts logiciels, sans oublier bien entendu les constructeurs automobiles eux-mêmes. S’il est difficile de bien cerner le poids financier de ce futur marché, des estimations à plusieurs milliards de dollars sont faites. Certaines études annoncent ainsi une manne de 750 milliards de dollars d’ici à 2030 : une bagatelle qui a le mérite de confirmer le potentiel économique du marché.

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La Google Car serait l’une des plus rassurantes © Techno Car

Mais alors pourquoi ce marché fascine-t-il autant ? Outre le fantasme de la voiture-robot, en quoi ce modèle de mobilité est-il prometteur ? Les adeptes de cette technologie mettent en avant l’argument sécuritaire. Les voitures autonomes permettraient une plus grande sécurité sur les routes, en évitant les comportement dangereux de certains conducteurs. La fatigue ou l’alcoolémie au volant restent des causes de mortalité très élevées et la voiture autonome pourrait participer à la baisse des accidents. Une aubaine pour la sécurité routière… En outre, l’argument de la mobilité pour tous est aussi avancé : les seniors ou les personnes à mobilité réduite pourront ainsi se déplacer de manière autonome (et sécurisée, on insiste !). Enfin, la question des économies d’énergie est souvent mise en avant. Au-delà des débats autour de l’intérêt écologique de la voiture de demain, il y a de fortes chances que ce véhicule soit alimenté avec de l’énergie électrique. Une manière de repenser l’utilisation des énergies fossiles et de transiter vers des énergies plus vertes et renouvelables ? Ce sont, en tout cas, les thèses brandies par les férus de ces driverless cars.

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Une voiture autonome conditionnée aux avancées techniques

Si le rêve semble à portée de main, la réalité est quelque peu différente. L’heure tourne, les progrès continuent mais le chemin vers l’autonomie totale semble encore long. Pour atteindre cet « idéal », une classification en cinq étapes a été mise en place. Elles correspondent chacune à un degré d’autonomisation supérieur au précédent :

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Les cinq étapes d’autonomisation d’un véhicule © PWC
  1. Le véhicule est capable d’assister le conducteur, soit au niveau du freinage, soit au niveau de la direction. L’attention du conducteur est requise à tout moment.
  2. Le véhicule est capable d’assister le conducteur au niveau du freinage et de la direction simultanément. L’attention du conducteur est requise à tout moment.
  3. Le véhicule peut gérer la plupart des aspects de la conduite selon certaines circonstances prédéfinies. Le conducteur peut quitter temporairement la route des yeux.
  4. Le véhicule peut prendre le contrôle total de la conduite selon certaines circonstances prédéfinies. Le conducteur peut se concentrer sur d’autres activités.
  5. Le véhicule peut conduire seul, sans conducteur et sans volant.

Outre la phase 1, les phases d’autonomisation sont définies comme partielle, conditionnelle, poussée et enfin totale. L’autonomisation totale représente donc cet idéal qui correspondrait à la voiture 100% autonome de demain. Cependant, pour l’heure, les voitures les plus avancées n’en sont qu’au stade 3 et sont limitées à des portions d’autoroute définies et à une vitesse de 60km/h.

De ce fait, ces véhicules à l’autonomie conditionnelle reposent sur des actions prédéfinies, apprises et analysées par la machine selon des circonstances prévues. Les systèmes embarqués doublés de l’intelligence artificielle permettent de programmer les véhicules pour qu’ils puissent faire face à diverses situations routières. Et cela ne vous a surement pas échappé, mais les intérieurs de nos véhicules modernes sont devenus des petits bijoux de technologie. Des capteurs bipent quand ils détectent quelque chose d’anormal, des radars sont installés pour vous aider à faire vos créneaux ou toute autre manœuvre impliquant des obstacles… La voiture d’aujourd’hui est désormais ultra connectée grâce aux technologies du numérique. Il n’en sera pas autrement pour la voiture 100% autonome : connexion au réseau via la 4G, imagerie ultra HD pour les capteurs, cartographie 3D… Dopée à l’IA, l’autonomisation des manœuvres est bel et bien à portée de main. Un logiciel intégré à l’habitacle permettra d’agir comme un « cerveau » humain et d’analyser certaines situations pour prendre les décisions adéquates. Bref, l’industrie automobile semble se trouver à la croisée des chemins…

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Des incertitudes qui persistent

Toutefois, ces chemins restent encore sinueux. Passé l’enthousiasme des premiers tests, la voiture autonome doit faire face à plusieurs freins. Le premier est technique : les voitures semi-autonomes ne distinguent pas encore les nuances des environnements dans lesquels ils évoluent. Pour faire simple, la voiture ne fait pas encore la différente entre un arbre et un piéton immobile. Cela pose relativement problème, surtout lorsque ces « arbres » se mettent à bouger pour traverser à l’improviste…

Le second frein est réglementaire : qui sera responsable en cas d’accident ? Malgré toutes les promesses de l’IA, l’accident de la route restera toujours une possibilité. A qui incombera alors la responsabilité d’un défaut ? Au « conducteur », au constructeur automobile, au concepteur de l’IA… ? Comment les assurances vérifieront-elles les circonstances de l’accident ? Tant de questions en suspens qui bloquent encore et toujours l’arrivée de la voiture autonome dans nos trajets quotidiens.

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La voiture autonome a encore ses preuves à faire © Rent a Car et Opinium Research

Enfin, comme beaucoup d’innovations touchant à l’intelligence artificielle, des questions éthiques agissent comme une entrave à leur adoption. Selon une étude réalisée par Opinium Research, seuls 6% des français sondés disent vouloir utiliser une voiture autonome immédiatement après sa mise en circulation. Déléguer à une machine le contrôle de son environnement inquiète. Surtout quand il s’agit de vie ou de mort : quelle décision prendra-t-elle dans le cas où elle devrait choisir entre sauver ses occupants ou d’autres utilisateurs de la route ? Les citoyens du monde vont devoir se saisir de ces questions-là s’ils veulent, un jour, voir leur rêve de voiture 100% autonome aboutir…

« Jamais, dans toute l’histoire de l’humanité, nous n’avons permis à une machine de décider seule qui doit vivre et qui doit mourir, sans supervision. Mais nous allons franchir ce cap bientôt ; et cela (…) va arriver dans un des aspects les plus terre-à-terre de notre quotidien : les transports. »

© Chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT)

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Une question de confiance…

La voiture de demain est conditionnée à l’évolution des nouvelles technologies. Le développement de l’IA permet de prévoir de plus en plus de situations routières complexes. Pourtant, la voiture 100% autonome ne semble encore qu’à mi-chemin de devenir réalité. Avant de débarquer sur le marché des particuliers, il y a fort à parier qu’elle soit déployée dans des situations plus maitrisables, comme des navettes publiques ou le transport de marchandises. Ce qui est certain, c’est que les citoyens devront bientôt choisir de faire confiance à une voiture-robot. Ou est-ce un robot-voiture ? À vous de voir…

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