Canal + et la Calédonie, c’est un belle histoire d’amour qui dure désormais depuis 1994 ! Alors que l’on retrouve ses partenaires distributeurs sur l’ensemble du territoire , la chaîne « cryptée » qui fêtera bientôt ses trente ans de présence locale, réalise également sa révolution numérique. L’occasion d’aller papoter avec son Directeur Général, Franck Carpentier, véritable « produit Canal », toujours prêt à soutenir le développement du territoire à travers des programmes accessibles à tous les abonnés, partout et tout le temps. Et comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, il nous a annoncé de belles surprises sur la programmation prochaine…
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Bonjour M. Carpentier et bienvenue sur NeoTech ; pour commencer notre échange, pourriez-vous vous présenter succinctement ainsi que votre parcours ?
Bonjour aux lecteurs de NeoTech ! Franck Carpentier, Directeur Général de « Canal + Calédonie » qui est aussi présente dans une zone plus large du Pacifique : Australie, Vanuatu, Wallis et Futuna… Le spectre de notre satellite nous permet d’adresser tous ces territoires, ainsi qu’un petit morceau de la Nouvelle-Zélande.
Côté parcours, je suis un pur produit de la télévision ! Après une première expérience en audit, plutôt orientée « finances », je suis rentré chez Canal + il y a déjà plus de vingt ans ; à cette époque, on lançait le satellite, c’était un foisonnement de créativité, l’arrivée de nouvelles chaînes thématiques… Pour ma part, je travaillais comme contrôleur de gestion dans l’une des sociétés du groupe Canal + qui créait justement ces chaînes thématiques : Planète +, Ciné Cinéma, Jimmy…
Du contrôle de gestion lors de mon arrivée en 1997, je suis passé directeur financier de la chaîne Canal + ; en 2009, j’ai eu envie d’aller visiter un peu le monde et l’opportunité de lancer une offre Canal + intitulée « K+ » sur le territoire vietnamien s’est présentée… Ni une, ni deux, nous sommes partis à cinq expatriés tenter l’aventure ! Notre mission, c’était de créer une chaîne spécialement conçue pour un public vietnamien.
Quatre années plus tard, je suis rentré en métropole et j’ai commencé à travailler comme directeur financier pour l’Afrique. A ce titre, je me rendais régulièrement en Afrique francophone, un continent qui connaissait un gros développement : à mon arrivée, il y avait un peu moins d’un million d’abonnés contre plus de six millions actuellement. Une superbe expérience !
Et voilà déjà quatre ans que j’ai été nommé Directeur Général en Calédonie… Un pur produit la télévision et, tout particulièrement de Canal +, voilà comment on pourrait résumer ce parcours.
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Vous êtes aujourd’hui Directeur Général chez Canal + Calédonie et Pacifique : quelles spécificités existe-t-il sur ces zones géographiques ?
Commençons par l’aspect général ; ce qui est intéressant, c’est d’analyser la consommation locale de contenus. L’information est un contenu audiovisuel communément adopté par tous les territoires, comme le sport, et le foot en particulier. Ce qui est drôle, c’est qu’ici, on regarde le foot à 7h du matin quand les asiatiques sont calés sur du 2h du matin et l’Europe ou l’Afrique sont sur les créneaux 20h, 21h… J’étais vraiment étonné de voir que nos concitoyens regardent les matchs en prenant un café le matin ! Pas les mêmes horaires, mais la même passion, partout dans le monde…
Cinéma, séries sont également des produits qui fonctionnent sur notre territoire ; finalement, la spécificité de la Calédonie, dont je n’avais pas forcément conscience, c’est le côté « ilien » : notre satellite nous permet de couvrir une large zone géographique avec nombre de territoires. Ici, il faut être à la fois à Tiga, à Belep… et même sur toutes les îles vanuataises. Le satellite a vraiment sa place sur ces territoires iliens ! Dans certaines zones éloignées ou isolées, c’est difficile de capter le signal car il est souvent bloqué par les chaînes de montage, comme à Hienghène par exemple, mais notre objectif, c’est que TOUS les Calédoniens puissent accéder à nos services.
La particularité de ce territoire, c’est donc de faire l’effort d’être partout, pas forcément à travers la présence physique d’une boutique ; je rêve que mon abonné puisse rester dans son canapé et consommer nos contenus sur son smartphone, via sa télécommande, sans qu’il n’ait à en bouger. Aujourd’hui, on progresse dans ce sens et c’est l’une de nos difficultés locales mais nous nous devons d’apporter l’information partout !
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Comment fonctionne donc ce fameux satellite qui permet à tous les Calédoniens de bénéficier de cette information ?
Un satellite est stationné au-dessus de nos têtes et couvre, grosso modo, la moitié de l’Australie, le Vanuatu, Wallis et Futuna et un morceau de Nouvelle-Zélande. Notre rôle est donc de transférer le signal fabriqué en France. Ce dernier arrive par fibre aux États-Unis après une traversée de l’Atlantique puis on le remonte via un satellite : ensuite, il suffit d’avoir une parabole, de l’électricité (et un abonnement) et on reçoit Canal + normalement, à peu près n’importe où.
Nous devons néanmoins faire attention à un aspect en particulier : les droits de diffusion sont territoriaux. En Calédonie et à Wallis, nous récupérons les droits métropolitains mais, par exemple, au Vanuatu, en Australie, nous ne pouvons pas diffuser exactement les mêmes contenus ; cependant, pour l’abonné une prise de courant suffit ! En Afrique, un simple générateur solaire tournait pendant la journée et était ensuite connecté à une batterie « pluggée » le soir et tout le monde pouvait regarder la télévision. Le progrès technologique permet donc de regarder Canal + à peu près partout dans le monde.
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La télévision aussi fait sa transformation digitale ! Comment se définit-elle chez Canal + ?
La télévision a toujours connu des révolutions ! Entre l’ORTF, la privatisation des chaînes, l’arrivée du satellite et le numérique aujourd’hui, combien d’étapes ont été franchies ? Les médias sont un secteur d’activité en bouleversements continuels depuis de nombreuses années.
Le numérique nous a obligé à revoir notre fonctionnement et à améliorer notre partie « servicielle » à destination de nos abonnés ; avant ces derniers étaient plutôt passifs : s’ils arrivaient à 19h45 pour regarder le JT, c’était trop tard et ils rataient leur programme ; le numérique a permis aux abonnés de récupérer le pouvoir sur la télécommande et de décider ce qu’ils voulaient regarder, quand et où ils le voulaient.
Aujourd’hui, plus de 60 000 contenus sont accessibles au moment où on le souhaite : c’est une révolution intéressante pour l’abonné ! Cette large quantité de programmes disponibles, c’est grâce à internet car il était bien plus difficile de réaliser cette prouesse auparavant, même avec les satellites. En parallèle, nous avons lancé la plateforme « Mycanal » qui permet d’accéder à nos contenus à Belep, sur la plage, n’importe où ! La véritable révolution numérique pour la télévision, c’est celle-là.
En outre, le numérique a amené un foisonnement et une vaste diversité de contenus pour les abonnés ; notre rôle, aujourd’hui, c’est de leur mettre en avant des contenus personnalisés, de pousser les programmes qui les intéressent particulièrement. On est désormais capables de savoir ce qu’ils regardent et veulent regarder, c’est ça l’apport d’internet et non la concurrence de Netflix ou d’autres pure players.
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En quoi le numérique a-t-il bouleversé votre métier et quel a été son impact sur votre grille de programmes ?
Prenons un exemple : nous allons prochainement diffuser le foot calédonien ; il y a cinq ans, c’est quelque chose que nous n’aurions pas pu faire ! Le matériel lié aux tournages coûte beaucoup moins cher, les liaisons spécialisées envoyées sur satellite également, de plus en plus de coproducteurs sont également prêts avec des investissements moins élevés pour le documentaire et les films… Tout le monde peut ainsi produire ses contenus digitaux. Nous nous considérons aujourd’hui plus comme un agrégateur : grâce à une simple télécommande on peut avoir Netflix, Disney + et demain, peut-être Paramount + ou Amazon… C’est ce service que nous offrons aux Calédoniens : la possibilité de regarder un maximum de choses tout en restant agnostiques sur les contenus proposés.
Nous voulons produire des choses qui intéressent nos abonnés ; nous avons nos propres productions pour « lutter » contre les opérateurs mondiaux et leurs flots de contenus et divertissements. Notre culture française nous permet d’apporter du contenu adapté à nos téléspectateurs : contenus locaux, collaborations avec le cinéma français…
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A ce sujet, on sait que des pure players sélectionnent leurs productions à l’aide d’algorithmes et poussent en sortie des programmes « personnalisés ». Avez-vous également une « politique de l’algorithme » ?
Bien évidemment ! Il y a deux, trois ans, nous avons lancé un nouveau décodeur hybride qui permet de réceptionner à travers le satellite mais également via internet. A partir de cette connexion internet, nous sommes capables de savoir ce qu’aiment nos abonnés – F1, séries… – et de leur pousser les bons programmes, au bon moment.
Côté productions, nous essayons de poursuivre notre logique de production francophone locale ; nous ne sommes pas en compétition avec « Netflix » ou « Disney + » car ils ne feront jamais du « pur local » qui est un apport de contenus différents et c’est notre rôle en Calédonie. Cette volonté est illustrée par la diffusion du foot local dont nous parlions, mais aussi une dizaine de coproductions annuelles qui sont diffusées sur nos antennes et qui adressent des sujets divers et variés.
Cette semaine, nous avons justement présenté un film documentaire sur l’apnée en Nouvelle-Calédonie, le mois dernier c’était sur les tatouages en Calédonie… On a également produit des documentaires sur la problématique de l’alcool en Calédonie, sur la culture ancestrale de la vanille, sur la faune et la flore calédonienne « de la crête au tombant », bref, on essaie de « parler à nos abonnés » qui aiment également savoir ce qu’il se passe autour d’eux…
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L’arrivée des plateformes de streaming par abonnement et autres webTV a-t-elle changé votre métier ?
Oui, ils nous ont forcé à engager cette révolution numérique, à exploiter les atouts de l’internet, à sortir du linéaire et à passer au full « replay », accessible n’importe où, n’importe quand. Nous sommes d’ailleurs en partenariat avec « Netflix » et avec « Disney + » : un abonné peut s’abonner à ces services via Canal + en payant en francs pacifique, associés à la TGC locale. Plutôt que de passer uniquement par internet et faire fi de tout ce qui est fiscalité, nous collaborons avec les institutions locales et contribuons à la croissance de l’économie calédonienne. De plus, nous proposons également NC La 1ère et Caledonia dans nos offres : le but du jeu, c’est que nos abonnés disposent d’un maximum de programmes qui les intéressent.
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Avez-vous des programmes dédiés à l’innovation et/ou à la technologie ? Quelle est votre marge de manœuvre sur la diffusion de programmes locaux par rapport à la « maison mère » ?
Nous avons des chaînes telles que « Discovery » qui sont orientées sur les thématiques scientifiques ; localement, nous n’avons pas de programmes dédiés mais, en étant partenaires de la FrenchTech Calédonie, nous souhaitons également soutenir l’innovation locale ; nous ne positionnons pas sur des émissions locales, des « programmes de flux » comme on les nomme, mais sur de la fiction documentaire que nous pouvons financier localement.
Cela fait près de 20 ans que nous avons un décrochage local sur les antennes de Canal +, c’est-à-dire que l’on peut visionner à l’échelle internationale des documentaires produits localement. De plus en plus de documentaires locaux sont également diffusés sur l’antenne « globale » de Canal +. En métropole, il existe une chaîne, « Canal + Outremer », qui rassemble toutes les productions faites par l’ensemble des filiales de Canal dans les territoires d’Outre-mer. C’est très intéressant pour nos producteurs et coproducteurs car ça leur apporte un surplus de visibilité et donc de rentrées financières non négligeables.
D’autres part, depuis l’année dernière, nous avons lancé la chaîne « PacifiC+ » qui est intégralement dédiée à la Nouvelle-Calédonie. Ça nous permet de remontrer à nos abonnés toutes les coproductions réalisées au fil des années et d’avoir un flux linéaire spécialement conçu pour les téléspectateurs calédoniens. On doit sortir de l’image de la Calédonie associée au nickel et aux événements politiques et c’est notre rôle de montrer les richesses de notre territoire exceptionnel !
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Vous êtes un partenaire / contributeur privilégié de la jeune « FrenchTech Nouvelle-Calédonie » ; pourquoi ce partenariat et en quoi consiste-t-il ?
La Calédonie est une terre qui foisonne et le numérique commence à s’y développer de manière intéressante ; dès qu’on a vu que le phénomène prenait de l’ampleur, et la FrenchTech contribue à ce développement, il était naturel de s’associer et de soutenir cette initiative en tant que partenaires ! Honnêtement, c’est moins par rapport à l’image que nous souhaitons donner que notre capacité à aider.
Nous produisons actuellement en interne des clips qui permettent de présenter l’activité de la cinquantaine de startup adhérentes à la FTNC. L’objectif, c’est qu’elles aient toutes une vidéo de « pitch » / présentation de leur société afin de se faire connaître, trouver des financements… On fait tout ça de manière bénévole en espérant qu’à un moment, on puisse réaliser un documentaire pour dévoiler ce foisonnement numérique.
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Avez-vous des chiffres clés et actualités à partager avec nos lecteurs ?
Le chiffe clé, c’est qu’environ la moitié des foyers calédoniens est abonnée à Canal +, soit environ quarante mille foyers sur le territoire. Ça fait plus de 25 ans que nous sommes présents en Calédonie et nous avons été les premiers à apporter du changement dans le secteur de l’audiovisuel local.
Les 50 collaborateurs locaux ont pour rôle d’être présents au plus près de nos abonnés à travers nos cinq boutiques et tous nos distributeurs ; c’est assez drôle car nous sommes ainsi partenaires d’armuriers, de boulangeries et même des stations Mobil. Quand on se balade en brousse, le centre-ville, c’est la station-service et nous souhaitions que nos abonnés n’aient pas des kilomètres à faire pour pouvoir bénéficier de nos services.
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Un dernier mot pour nos lecteurs ?
La vraie grosse information du moment, c’est qu’on va pouvoir diffuser la « Super Ligue de Football calédonien », le championnat de foot local ; deux matchs seront disponibles les samedis, diffusés sur « PacifiC+ » à compte du 9 avril prochain.
Vous aurez rendez-vous avec le foot calédonien sur nos antennes. Ça va peut-être permettre de faire monter le niveau du foot calédonien pour qu’il soit un jour représenté à la Coupe du Monde ! RDV sur Canal + !
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