Jeudi 25 avril, le traditionnel petit-déjeuner informel de l’Autorité de la Concurrence de la Nouvelle-Calédonie a changé de lieu pour se dérouler à l’Origin Cinema, au lieu de la Station N initialement prévue. Ce changement de décor visait à profiter de l’effervescence du salon Numeriboost en étant la première conférence de la salle 12. Les deux principaux sujets abordés ce jour-là, qui ont attiré un public nombreux, étaient le futur de la connectivité et de l’intelligence artificielle en Nouvelle-Calédonie.

Ces sujets, très débattus sur le territoire, ont attiré un public « inhabituel », comprenant notamment un nombre significatif d’étudiants, soulignant ainsi leur importance pour les Calédoniens. Stéphane RettererSophie CharlotAmandine Jacquemot, Joseph Glad, Chloé Racine ont pris la parole pour présenter les résultats de la consultation et aborder le thème « IA », en la présence surprise de Christopher Gygès. Il va sans dire que ni le café ni les croissants n’ont suffi à calmer l’impatience du public.

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L’Autorité de la Concurrence 101

Stéphane Retterer, président de l’Autorité de la Concurrence de Nouvelle-Calédonie a débuté par une courte présentation. Présente dans 160 pays sur 200, cette organisation veille à ce que les marchés restent ouverts et compétitifs. En tant qu’organe de régulation indépendant, elle combat les pratiques anticoncurrentielles telles que les ententes illicites et les abus de position dominante tout en examinant les fusions et acquisitions pour prévenir toute concentration excessive. Cette vigilance renforce l’innovation, protège les consommateurs et favorise des secteurs dynamiques et équitables. 

« La mise en place d’une autorité de régulation adéquate est essentielle pour garantir que tous les acteurs respectent les règles de la concurrence équitable.”

Stéphane Retterer
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En Nouvelle-Calédonie, malgré sa jeunesse relative de seulement six ans, l’Autorité de la Concurrence s’est déjà vue attribuer des missions importantes, telles que l’examen des prestations funéraires, de la filière fruits et légumes, ainsi que des questions liées au coût de la vie. Elle a été sollicitée pour aborder un large éventail de sujets essentiels. Son dernier avis porte sur l’avant-projet de loi de pays pour une meilleure connectivité, comprenez : l’arrivée des opérateurs satellitaires Starlink et OneWeb. Suite à la demande du gouvernement et après plusieurs auditions, l’Autorité de la Concurrence a émis un avis favorable sur cet avant-projet de loi le lundi 11 mars dernier.

“Notre but : améliorer la connectivité pour tous les Calédoniens en ouvrant le marché à la concurrence et en couvrant toutes les zones du territoire, y compris les zones blanches. Il est temps de moderniser le code des postes obsolète. En juin ou juillet auront lieu les Assises des télécoms, accompagnées d’un large sondage pour connaître les attentes des Calédoniens. Avec l’arrivée de la concurrence, nous avons le choix de nous y préparer activement ou de la subir passivement.”

Christopher Gygès

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L’internet satellitaire, un rêve d’aujourd’hui

La méthodologie utilisée pour l’Avis 2024-A-01 sur “une meilleure connectivité en Nouvelle-Calédonie” fut présentée par Amandine Jacquemot. À savoir que les conclusions de cet avis de consultation, ont été rendues (trop ?) rapidement. En effet, en seulement trente jours, l’Autorité a mené des auditions auprès d’acteurs publics et privés tels que la DINUM et l’OPT et a étudié le fonctionnement des marchés de l’accès à internet. Ce délai relativement court a suscité des interrogations quant à la fiabilité des résultats de l’étude de marché. Toutefois, les besoins urgents du pays pour ne pas rester en marge des avancées technologiques modernes ont été soulignés par Christopher Gygès.

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Par la suite, Joseph Glad a présenté les conclusions de l’enquête. Il a noté que le marché était mature depuis plusieurs décennies et que les prix, évalués à l’aide de prix.nc, n’avaient que peu évolué depuis les années 90. Néanmoins, la qualité de service était en deçà des attentes et les offres étaient complexes et difficiles à comprendre pour les consommateurs. Joseph a ensuite énuméré les neuf recommandations consultatives de l’Autorité de la Concurrence de la Nouvelle-Calédonie, parmi lesquelles figurent :

  • Clarifier l’articulation des missions de l’OPT-NC exercées sous monopole et celles exercées sur le marché concurrentiel, notamment pour les opérateurs de télécommunications nouvellement définis ;
  • Mettre en place une régulation indépendante pour garantir un traitement transparent, objectif et non-discriminatoire des opérateurs ;
  • Définir clairement le cahier des charges applicable aux opérateurs, en veillant à un traitement équitable entre les fournisseurs d’accès à Internet et l’OPT-NC ;
  • Revoir et ajuster divers éléments de la grille tarifaire de l’OPT-NC pour garantir l’équité entre les différents acteurs du marché ;
  • Mettre en place des mécanismes de contrôle efficaces pour assurer le respect des engagements des opérateurs.
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Et l’IA dans tout ça ?

Après une longue parenthèse du public – légèrement hors sujet – sur le « monopole » de la CSB sur les solutions de e-paiement, Chloé Racine, juriste, a pris la parole pour souligné l’importance de la présence d’une Autorité de la Concurrence dans les pays, particulièrement face à des géants du numérique tels que les GAFAM. Elle a alors évoqué la façon dont les Autorités de la concurrence abordent ces enjeux, en mettant en avant le lien essentiel entre innovation et concurrence : le monopole entrave l’innovation

Pour illustrer ce point, elle a utilisé l’exemple concret de Google Shopping a été au centre de controverses liées à l’auto-préférence, une pratique où une plateforme favorise ses propres produits par rapport à ceux de ses concurrents. Dans ce cas, Google a été critiqué et sanctionné à hauteur de 2,42 milliards d’euros pour avoir mis en avant ses propres résultats de shopping au détriment d’autres sites de comparaison de prix.

Pour terminer, qui dit innovation numérique dit notamment Intelligence Artificielle ! Stéphane Retterer, qui a repris le micro pour conclure l’événement, a souligné son importance émergente pour l’Autorité de la Concurrence en Nouvelle-Calédonie. La question centrale posée était de savoir s’il était possible de réguler ces technologies. L’Autorité française souhaite anticiper sur ce domaine et s’est déjà auto-saisie pour donner son avis et comprendre le fonctionnement du marché, encore en partie obscur. Consciente de ses précédentes actions relativement inefficaces quant aux GAFAM, elle anticipe et se prépare à traiter ces sujets. Suite au prochain épisode pour la Nouvelle-Calédonie…

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